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L’ODHD, un EPST au service de l’évaluation de la pauvreté et de la promotion du Développement Humain Durable au Mali
Tél : (223) 20 23 85 53 ; Fax : (223) 20 23 85 52 ; Web : www.odhd-mali.org; E-mail : odhd@odhd-mali.org
REPUBLIQUE DU MALI
Un Peuple – Un But – Une Foi
MINISTERE DE LA SANTE
ET DU DEVELOPPEMENT SOCIAL
------------
Secrétariat Général
------------
Observatoire du Développement Humain
Durable et de la Lutte Contre la Pauvreté
RAPPORT NATIONAL SUR LE
DEVELOPPEMENT HUMAIN, Edition 2022
Distribution et redistribution du
revenu au Mali et leurs impacts sur
la pauvreté et les inégalités
Janvier 2022
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L’ODHD, un EPST au service de l’évaluation de la pauvreté et de la promotion du Développement Humain Durable au Mali
Tél : (223) 20 23 85 53 ; Fax : (223) 20 23 85 52 ; Web : www.odhd-mali.org; E-mail : odhd@odhd-mali.org
Préface
Dans la perspective de réduction de la pauvreté et des inégalités et pour plus d’équité et de
justice sociale, le Ministère de la Santé et du Développement social, à travers l’Observatoire du
Développement Humain Durable et de Lutte Contre la Pauvreté en collaboration avec le
Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD), a réalisé le Rapport National
sur le Développement Humain 2021 dont le thème porte sur « Distribution et redistribution du
revenu au Mali et leurs impacts sur la pauvreté et les inégalités ».
Au Mali, la lutte contre la pauvreté et les inégalités est une priorité constante du Gouvernement
depuis la stratégie nationale de lutte contre la pauvreté (1998) et les différents documents de
réduction de la pauvreté dont le dernier est le CREDD (2019-2023). Malgré la mise en œuvre
de ces différentes politiques, beaucoup d’efforts restent à faire pour l’atteinte des résultats
escomptés. C’est bien ce qui ressort de l’étude "Analyse-diagnostic des inégalités entravant la
croissance inclusive au Mali" réalisée par l’ODHD/LCP en partenariat avec le Centre
Universitaire de Recherche et d'Etudes Sociales (CURES) en 2019 de l’Université des Sciences
Sociales et de Gestion de Bamako (USSGB).
Selon cette recherche, je cite : "Au Mali, malgré la forte croissance économique enregistrée au
cours de ces 15 dernières années (5,7% en moyenne), force est de constater que les résultats
en matière de réduction de la pauvreté et des inégalités sur la période 2001-2017 restent
faibles. En effet, pendant la même période, le taux de pauvreté est passé de 55,6% à 44,9%, et
les inégalités de revenus mesurées par l’Indice de Gini, n’ont baissé que de 0,03 points en
passant de 0,39 à 0,36 (MEF, Revue CREDD 2018) ".
Il ressort de ces mêmes analyses quatre (4) formes majeures d’inégalité qui amoindrissent les
fruits d’une croissance inclusive pour tous, à savoir : (i) les inégalités sur le marché du travail ;
(ii) les inégalités de revenus, d’accès aux ressources productives et de redistribution ; (iii) les
inégalités sociales et de développement humain et (iv) les inégalités de genre.
Le présent rapport qui se focalise sur les inégalités de revenus est structuré en cinq (5) sections
suivies de conclusion et de recommandations. La première section porte sur le contexte et la
justification de l’étude et la deuxième sur l’approche méthodologique. Le niveau et la structure
du revenu sont analysés dans une troisième section, suivie de celle portant sur l’analyse de la
distribution, de la pauvreté et de l’inégalité de revenu. La cinquième section analyse l’effet de
la redistribution sur la pauvreté et l’inégalité de revenu.
L’objectif général de l’étude qui est d’analyser les impacts de la distribution et de la
redistribution du revenu sur la pauvreté et sur les inégalités au Mali a abouti à des résultats à
prendre en compte dans la formulation de nos politiques et programmes sociaux.
Ces résultats montrent que dans les données de l’Enquête modulaire permanente auprès
des ménages (EMOP), il y a 3 grandes sources de revenu à savoir le revenu procuré par
le travail, le revenu procuré par le capital et le revenu tiré des transferts. Le revenu du
travail comprend à son tour les salaires et le revenu d’activité des indépendants qui
peuvent être agricoles ou non agricoles.
La pauvreté frappe en 2019 un peu moins de la moitié de la population (47,8%) mais
cette incidence est plus grande en milieu rural (27,3%) qu’en milieu urbain (13,9%).
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Le niveau global d’inégalité de revenu mesuré par l’indice de Gini est, en 2019, de
44,5%. La distribution du revenu est plus inégalitaire en milieu urbain et parmi la
population ayant un homme comme chef de ménage.
La redistribution par les taxes a eu pour effet d’augmenter les indices de pauvreté, aussi
bien l’incidence que la profondeur. Le milieu urbain est plus touché que le milieu rural
en termes d’augmentation de la proportion de pauvres mais moins touché en termes
d’augmentation de l’écart moyen des pauvres à la ligne de pauvreté.
La prise en compte des recommandations proposées dans le cadre de cette étude permettra j’en
suis persuadé d’appuyer le suivi évaluation du Cadre stratégique pour la Relance Economique
et le Développement Durable (CREDD 2019-2023) et des Objectifs de Développement Durable
(ODD) en vue de réduire la pauvreté et les inégalités de revenu des populations.
Diéminatou SANGARE
Ministre de la Santé et du Développement social
Chevalier de l’Ordre national
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Table des matières
Préface ........................................................................................................................................ ii
Table des matières ..................................................................................................................... iv
Liste des tableaux ....................................................................................................................... v
Liste des graphiques ................................................................................................................... v
Sigles et abréviations .................................................................................................................. 1
Résumé ....................................................................................................................................... 2
Introduction ................................................................................................................................ 3
1. Contexte et justification .................................................................................................. 5
2. Approche méthodologique .............................................................................................. 7
2.1. Revue de littérature .................................................................................................. 7
2.2. Analyse des données secondaires .......................................................................... 11
2.2.1. Mesures des inégalités ........................................................................................ 11
2.2.2. Mesures de la pauvreté ....................................................................................... 12
2.2.3. Mesure de la progressivité de la redistribution .................................................. 13
2.2.4. Effet redistributif du système d'impôts et de transferts ...................................... 13
2.3. Collecte de données qualitatives ............................................................................ 14
3. Niveau et structure du revenu ........................................................................................ 15
3.1. Sources des revenus ............................................................................................... 15
3.2. Structure du revenu global ..................................................................................... 15
3.3. Structure du revenu du travail ................................................................................ 17
3.4. Évolution de la structure des revenus .................................................................... 18
4. Distribution, pauvreté et inégalité de revenu ................................................................ 19
4.1. Répartition du revenu ............................................................................................. 19
4.2. Indices de bien-être des ménages et pauvreté ........................................................ 21
4.3. Indices d'inégalité de revenu .................................................................................. 23
4.4. Décomposition des indices de pauvreté et d'inégalité de revenu ........................... 25
5. Redistribution du revenu et effet sur la pauvreté et l’inégalité ..................................... 30
5.1. Méthodes d'estimation des effets redistributifs ...................................................... 30
5.2. Redistribution par les transferts publics et privés .................................................. 31
5.3. Redistribution par la fiscalité ................................................................................. 33
5.4. Effets de la redistribution sur la pauvreté .............................................................. 35
5.5. Effets de la redistribution sur l’inégalité de revenu ............................................... 37
Conclusion ................................................................................................................................ 40
Recommandations .................................................................................................................... 41
Références bibliographiques .................................................................................................... 43
Annexes .................................................................................................................................... 45
Annexe 1. Indicateurs d’inégalités ...................................................................................... 45
Annexe 2. Indicateurs de pauvreté ...................................................................................... 49
Annexe 3. Indicateurs de redistributions ............................................................................. 51
Annexe 4. Termes de Référence .......................................................................................... 52
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Liste des tableaux
Tableau 1. Structure du revenu annuel selon le milieu et la région (en %).............................. 16
Tableau 2. Structure du revenu total selon le sexe et le niveau d’éducation (en %) ................ 16
Tableau 3. Structure du revenu du travail selon le milieu et la région (en %) ......................... 17
Tableau 4. Structure du revenu du travail selon le sexe et le niveau d’éducation (en %) ........ 18
Tableau 5. Évolution de la structure du revenu total (en %) .................................................... 18
Tableau 6. Parts de revenu total et de population .................................................................... 20
Tableau 7. Déciles de revenu total ........................................................................................... 21
Tableau 8. Évolution de la distribution du revenu total (en %) ............................................... 21
Tableau 9. Indices de pauvreté de 2018 selon le milieu et la région administrative (en %) .... 22
Tableau 10. Indices de pauvreté 2019 selon le sexe et le niveau d’éducation du chef de ménage
(en %) ....................................................................................................................................... 23
Tableau 11. Décomposition par milieu de l’incidence de la pauvreté ..................................... 25
Tableau 12. Décomposition par région de l’incidence de la pauvreté ..................................... 26
Tableau 13. Décomposition par sexe de l’incidence de la pauvreté ........................................ 26
Tableau 14. Décomposition par niveau d’éducation de l’incidence de la pauvreté ................. 26
Tableau 15. Décomposition par milieu de l’indice d’entropie généralisée GE(0) ................... 27
Tableau 16. Décomposition par sexe de l’indice d’entropie généralisée GE(0) ...................... 27
Tableau 17. Décomposition par niveau d’éducation de l’indice d’entropie généralisée GE(0)
.................................................................................................................................................. 27
Tableau 18. Décomposition par milieu de l’indice de Gini ..................................................... 28
Tableau 19. Décomposition par sexe de l’indice de Gini......................................................... 28
Tableau 20. Décomposition par niveau d’éducation de l’indice de Gini ................................. 29
Tableau 21. Décomposition par région de l’indice de Gini ..................................................... 29
Tableau 22. Transferts reçus par les ménages (en milliards FCFA) ........................................ 32
Tableau 23. Impôts, taxes et charges sociales (en milliards FCFA) ........................................ 34
Tableau 24. Effet de la redistribution sur la pauvreté (en %)................................................... 36
Liste des graphiques
Graphique 1. Évolution des indices de pauvreté P0, P1 et P2 (en %) ...................................... 23
Graphique 2. Indice de Gini selon le milieu, le sexe et l’éducation du chef de ménage .......... 24
Graphique 3. Indice de Gini selon la région ............................................................................. 24
Graphique 4. Évolution de l’indice de Gini ............................................................................. 25
Graphique 5. Taux effectifs de transferts par région, milieu, sexe et niveau d’éducation (en %)
.................................................................................................................................................. 33
Graphique 6. Taux effectifs des prélèvements obligatoires (en %) ......................................... 34
Graphique 7. Taux effectifs des prélèvements obligatoires par région, milieu, sexe et éducation
(en %) ....................................................................................................................................... 35
Graphique 8. Évolution de l’effet des taxes sur la pauvreté (en %) ......................................... 37
Graphique 9. Variations de l’indice de Gini par milieu, sexe et niveau d’éducation (en %) ... 38
Graphique 10. Variation de l’indice de Gini dans les régions (en %) ...................................... 38
Graphique 11. Évolution de l’effet de la redistribution sur l’inégalité (en %) ......................... 39
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Odhd
Sigles et abréviations
CANAM Caisse nationale d'assurance maladie
CMSS Caisse malienne de sécurité sociale
CNPM Conseil national du patronat du Mali
CPS/SS-DS-PF Cellule de planification et de statistique / Secteurs santé-développement
social-promotion de la femme
CREDD Cadre stratégique pour la relance économique et le développement
durable
CSCRP Cadre stratégique pour la croissance et la réduction de la pauvreté
CSG Contribution sociale généralisée
CSLP Cadre stratégique de lutte contre la pauvreté
CT/CSLP Cellule technique du Cadre stratégique de lutte contre la pauvreté
CURES Centre universitaire de recherche et d'études sociales
DGB Direction générale du budget
DGI Direction générale des impôts
DNDS Direction nationale du développement social
DNPD Direction nationale de la planification du développement
DNTCP Direction nationale du trésor et de la comptabilité publique
DSRP Document de stratégie de réduction de la pauvreté
EMOP Enquête modulaire permanente auprès des ménages
FCFA Franc de la communauté financière africaine
FGT (des auteurs) Foster, Greer, et Thorbecker
GE Entropie généralisée
GREAT Groupe de recherche en économie appliquée et théorique
HE Equité horizontale
IERGGM Institut d’études et de recherche en géronto-gériatrie
INPS Institut national de prévoyance sociale
INSTAT Institut national de la statistique
IR Redistribution de revenu
ITS Impôt sur les traitements et salaires
ODD Objectif de développement durable
ODHD/LCP Observatoire du développement humain durable et de la lutte contre la
pauvreté
PPP Partenariat public-privé
PTF Partenaire technique et financier
RE Equité de reclassement
SLIS Système local d'information sanitaire
SMIG Salaire minimum interprofessionnel garanti
TDRL Taxe de développement régional et local
Tmi Taux marginal d'imposition
TOFE Tableau des opérations financières de l'Etat
TR Redistribution d’impôts
TVA Taxe sur la valeur ajoutée
UEMOA Union économique et monétaire ouest africaine
VE Equité verticale
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2
Odhd
Résumé
Dans les pays en développement, pour diverses raisons, les politiques de développement
élaborées et mises en œuvre n’arrivent pas à atteindre, dans la plupart des cas, les objectifs à
elles initialement assignés. Au Mali, la lutte contre la pauvreté et les inégalités, une priorité
constante du Gouvernement, ne fait pas exception à cette règle. Pour cela, cette étude s’est fixé
comme objectif général d’analyser les impacts de la distribution et de la redistribution du revenu
sur la pauvreté et sur les inégalités au Mali.
L’approche méthodologique adoptée comporte : la revue de littérature ; les entretiens
individuels avec des experts ; l’application d’outils et de méthodes d’analyse des indicateurs
de pauvreté et d'inégalités à savoir (i) les mesures statistiques de dispersion, (ii) les indices
d'entropie généralisée et (iii) les indices Atkinson-Kolm-Sen et l’approche monétaire de mesure
de la pauvreté, privilégiée par la Banque mondiale à travers l’approche dite FGT (Foster-Greer-
Thorbecker). La progressivité de la redistribution est mesurée à travers les comparaisons entre
courbes de Lorenz et/ou courbes de concentration et les indices : (i) MT de Musgrave et Thin,
(ii) K de progressivité de Kakwani et (iii) RS de Reynolds-Smolensky.
Les résultats montrent que dans les données EMOP, il y a trois (3) grandes sources de revenu à
savoir : le revenu procuré par le travail, le revenu procuré par le capital et le revenu tiré des
transferts. Le revenu du travail comprend, à son tour, les salaires et le revenu d’activité des
indépendants qui peuvent être agricoles ou non agricoles. Le revenu annuel total de l’ensemble
du pays est estimé en 2019 à 3 984 milliards de FCFA dont 91% de revenu du travail, 7% de
transferts et 2% de revenu de capital.
La pauvreté frappe en 2019 un peu moins de la moitié de la population (47,8%) mais cette
incidence est plus grande en milieu rural (27,3%) qu’en milieu urbain (13,9%). Les régions les
plus pauvres sont celles de Sikasso (73,8%), Koulikoro (69,9%), Ségou (59,3%) et Gao (51,8%)
et les moins pauvres sont Kidal, Bamako, Tombouctou et Kayes. Le taux de pauvreté baisse
clairement avec le niveau d’éducation. L’écart moyen au seuil de pauvreté est de 23% dans
l’ensemble et a globalement les mêmes tendances que le taux de pauvreté. Les contributions
relatives à la pauvreté sont de 7% pour le milieu rural et 92% pour le milieu urbain.
Le niveau global d’inégalité de revenu mesuré par l’indice de Gini est, en 2019, de 44,5%. La
distribution du revenu est plus inégalitaire en milieu urbain et parmi la population ayant un
homme comme chef de ménage. La composante intra-milieu de l’inégalité de revenu pèse
50,8% contre 31% pour la composante inter-milieu.
La redistribution par les taxes a eu pour effet d’augmenter les indices de pauvreté, aussi bien
l’incidence que la profondeur. Le milieu urbain est plus touché que le milieu rural en termes
d’augmentation de la proportion de pauvres mais moins touché en termes d’augmentation de
l’écart moyen des pauvres à la ligne de pauvreté. L’effet des taxes sur les inégalités est aussi à
la hausse mais atténuée par l’effet des transferts sur les revenus des ménages surtout ceux au
bas de la distribution. L’essentiel des prélèvements obligatoires est constitué par la taxe sur la
consommation des ménages (17,2%), comparativement à l’impôt sur le revenu (5,4%) et très
peu de charges sociales (0,5%) puisque l’emploi est majoritairement informel.
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3
Odhd
Introduction
Dans les pays en développement, l’une des principales problématiques des politiques de
développement réside dans leur ineffectivité. En effet, pour diverses raisons, ces politiques
élaborées et mises en œuvre, n’arrivent pas à atteindre, dans la plupart des cas, les objectifs
initialement poursuivis. Parmi les nombreuses explications données à cette contreperformance,
il y a :
✓ le mauvais ciblage des bénéficiaires des politiques ;
✓ les comportements déviants des agents publics et de la population ;
✓ les coûts à supporter pour consommer les biens et services procurés par la politique ;
✓ les faibles capacités techniques des acteurs communautaires à la base ;
✓ le faible niveau d’information des potentiels bénéficiaires ;
✓ l’insuffisance quantitative et qualitative des statistiques sur lesquelles se fondent les
politiques ;
✓ certaines pesanteurs socioculturelles
✓ l’insécurité.
La combinaison de ces facteurs peut conduire à l’inefficacité de certaines politiques et, dans le
pire des cas, produire des effets contraires à ce qui est réellement recherché. Dans le cas
particulier des politiques de redistribution par la fiscalité ou par les transferts, en prélevant
principalement sur les revenus des plus riches pour procurer des biens et services publics et en
faisant des transferts directement au profit des plus pauvres, l’inefficacité de ces opérations
pourrait conduire à détériorer la situation des plus pauvres ou à une distribution de revenu plus
inégalitaire au sortir du système de redistribution.
L’analyse du système de redistribution et de ses effets sur la pauvreté et les inégalités dans le
cas particulier du Mali, objet de cette étude, tire sa pertinence de la multiplicité des
prélèvements obligatoires et des transferts avec souvent des logiques contradictoires, de la
présence au Mali de nombreux facteurs, précédemment cités, pouvant contrarier l’efficacité de
la redistribution. Dans ces conditions, bien que les barèmes nominaux d’impôts/taxes laissent
croire à des prélèvements obligatoires progressifs, l’issue finale peut s’avérer être au détriment
des plus vulnérables ou à l’avantage des plus nantis ; ce qui est contraire à l’objectif recherché.
L’objectif général de l’étude est d’analyser les impacts de la distribution et de la redistribution
du revenu sur la pauvreté et sur les inégalités au Mali.
De façon spécifique, il s’agit :
✓ de décrire les différentes formes de pauvreté et d’inégalités sociales dues ou liées à la
distribution et à la redistribution des revenus ;
✓ de faire l’analyse de la structure fiscale, surtout en lien avec la distribution et la
redistribution des revenus ;
✓ d’analyser les mécanismes des transferts publics en lien avec la réduction de la pauvreté et
des inégalités ;
✓ d’évaluer l’impact des divers mécanismes de redistribution sur le niveau de vie des
populations ;
✓ de proposer des mesures en vue d’un meilleur ciblage des transferts publics et d’une
amélioration de la redistribution des revenus pour une réduction des inégalités et de la
pauvreté ;
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4
Odhd
✓ d’identifier des stratégies pouvant favoriser la mise en œuvre des mesures proposées.
Concrètement, il s’agit de faire un état des lieux du système fiscal et des transferts notamment
du point de vue de la progressivité des impôts et taxes, des autres formes de prélèvement
obligatoire et des transferts. L’atteinte des objectifs requiert aussi de mesurer la variation des
indicateurs de pauvreté et d’inégalité suite au déploiement du système de redistribution.
Les résultats attendus de l’étude sont les suivants :
✓ les différentes formes d’inégalités sociales dues ou liées à la distribution et à la
redistribution des revenus sont décrites ;
✓ la structure fiscale en lien avec la distribution et la redistribution des revenus est
analysée ;
✓ les mécanismes des transferts publics, en lien avec la réduction de la pauvreté, sont
analysés ;
✓ l’impact des divers mécanismes de distribution et de redistribution sur le niveau de vie
des populations est évalué ;
✓ des recommandations en vue d’un meilleur ciblage des transferts publics et d’une
amélioration de la redistribution des revenus sont formulées ;
✓ des stratégies de mise en œuvre desdites recommandations sont identifiées.
La suite du document comporte cinq (5) sections suivies des conclusions et des
recommandations. La première section porte sur le contexte et la justification de l’étude et la
deuxième sur l’approche méthodologique. Le niveau et la structure du revenu sont analysés
dans la troisième section, suivie de celle portant sur l’analyse de la distribution de la pauvreté
et de l’inégalité de revenu. La cinquième section analyse l’effet de la redistribution sur la
pauvreté et l’inégalité de revenu. Enfin, des conclusions et des recommandations pertinentes et
opérationnelles sont formulées.
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5
Odhd
1. Contexte et justification
La lutte contre la pauvreté et les inégalités fait partie des priorités du Gouvernement du Mali.
Depuis 2002, cela apparait dans les différents Documents de stratégie de réduction de la
pauvreté (DSRP) que sont le CSLP, les CSCRP I et II, les CREDD I et II qui lui accordent tous
une place de choix. Ainsi, l’axe stratégique 3 du CREDD II (2019-2023), intégrant les ODD et
intitulé "Croissance inclusive et transformation structurelle de l’économie", consacre un
objectif spécifique à la promotion d’une croissance réductrice de la pauvreté et des inégalités.
Selon Dao et Godbout (2014), pour lutter contre les inégalités, les États utilisent deux
instruments, à savoir (i) les dépenses publiques, c’est-à-dire la fourniture des services publics
et des transferts en espèces et (ii) la fiscalité. Dans ce dernier cas, il s’agit du niveau de recettes
fiscales collectées et de la manière dont celles-ci sont prélevées et dépensées. Dans le premier
cas et pour concrétiser sa volonté politique, l’Etat, parfois soutenu par des Partenaires
techniques et financiers (PTF), mène des actions pour non seulement rapprocher les populations
des services sociaux et économiques à travers la construction d’infrastructures mais aussi pour
faciliter l’accès de ces mêmes populations aux services et biens publics.
Au regard de l’accessibilité géographique des populations aux infrastructures, des avancées
significatives ont été enregistrées. Il en est de même pour ce qui est de l’accessibilité financière
aux services sociaux de base surtout durant les années antérieures à la crise multidimensionnelle
qui a débuté en 2012. Par exemple, en 2018, le taux brut de scolarisation au niveau de
l’enseignement fondamental 1 était de 76.5% (Revue CREDD, 2018), le taux moyen
d’accessibilité à un rayon de 5 km d’un centre de santé était de 57% (CPS/SS-DS-PF, SLIS,
2018) et 82.9% des ménages maliens avaient accès à l’eau potable (EMOP, 2017).
S'agissant des prestations sociales, elles sont mises en œuvre à travers des régimes contributifs
et non contributifs. Pour les premiers, des soins médicaux, des allocations familiales, des
prestations de vieillesse, d'invalidité, du survivant, etc. sont accordés aux affiliés et/ou à leurs
ayants-droits par les institutions de sécurité sociale. Quant aux seconds, essentiellement sous
forme d’aides sociales, ils constituent les différentes subventions du carburant, de l’électricité,
de l’eau, des intrants agricoles, des denrées alimentaires, des aliments- bétails, les gratuités
scolaires et médicales, les distributions de kits scolaires, l’appui nutritionnel aux enfants, les
transferts monétaires, etc. (Politique nationale de protection sociale, 2016).
Par rapport à la fiscalité, l’engagement de la Direction générale des impôts a été exprimé à
travers un plan stratégique pour la période 2019-2021. Sixième du genre de l’Administration
fiscale, depuis sa création par l’Ordonnance N° 02-058/P-RM du 5 Juin 2002, ce plan consiste
à mener des activités qui contribueront à la pérennisation de l’accroissement des recettes pour
le développement économique et social du Mali.
Malgré les efforts fournis par le Gouvernement, les niveaux de la pauvreté et des inégalités au
Mali demeurent insatisfaisants. C’est bien ce qui ressort de l’étude "Analyse-diagnostic des
inégalités entravant la croissance inclusive au Mali" réalisée par l’ODHD/LCP et le Centre
universitaire de recherche et d'études sociales (CURES) en 2019 qui informe en ces termes :
"Au Mali, malgré la forte croissance économique enregistrée au cours des quinze (15) dernières
années (5.7% en moyenne), force est de constater que les résultats en matière de réduction de
la pauvreté et des inégalités sur la période 2001-2017 restent faibles. En effet, pendant la même
période, le taux de pauvreté est passé de 55.6% à 44.9% et les inégalités de revenus, mesurées
par l’Indice de Gini, n’ont baissé que de 0.03 point en passant de 0.39 à 0.36. En outre, 64% de
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6
Odhd
la population totale du pays sont touchés par la pauvreté de masse et 22% vivent dans l’extrême
pauvreté" (Revue CREDD, 2018).
Du point de vue de la répartition géographique, quelle que soit la mesure de la pauvreté, elle
est davantage rurale. En 2018, sur le plan monétaire, en milieu rural, plus de la moitié de la
population était pauvre (54,1%) contre une incidence de 24,6% pour le milieu urbain hors
Bamako et 4,1% pour le District de Bamako (EMOP, 2019). Il en est de même pour la pauvreté
des conditions de vie. En effet, le Profil de la pauvreté au regard de l’offre des services sociaux
et économiques de base (éducation, santé, eau, énergie, banque, couverture téléphonique, etc.)
élaboré par l’ODHD/LCP, en 2018, révèle que sur 666 communes rurales, seulement 143 sont
"non pauvres", soit 21% contre 86% pour les 37 communes urbaines.
Au-delà de la persistance de la pauvreté monétaire, 43,8% d'incidence en 2018 (EMOP, 2019),
d'importantes inégalités de revenus existent. Ainsi, selon le Groupe de recherche en économie
appliquée et théorique, en 2016, les 10% les plus riches gagnaient 26 fois plus que les 10% les
plus pauvres ou 10 fois plus que les 40% les plus pauvres. La forte inégalité constatée est plus
à l'intérieur des stratifications sociales ou spatiales qu'entre celles-ci. Ainsi, l'inégalité entre
classes de revenu est à 85% à l'intérieur des classes et à seulement 15% entre classes. Il y aurait
ainsi plus d'inégalités entre individus qu'entre groupes plus ou moins homogènes d'individus
(GREAT, 2016).
Par ailleurs, dans le domaine de la fiscalité, le taux de pression fiscale, compte tenu ou non des
incitations fiscales, constitue un levier et un mécanisme permettant, d'une part, d'orienter
l'affectation des ressources d'une économie et, d'autre part, de modifier la redistribution des
revenus et des patrimoines. Ainsi au Mali, la pression fiscale était de 11,9 % du PIB en 2018,
largement en-deçà des normes communautaires de l’UEMOA (20% à l’horizon 2019). Au Mali,
au-delà de la situation économique, il y a une faible communication sur les impôts sur le secteur
informel où bon nombre de contribuables ne savent pas combien et comment payer et souvent
ne veulent pas payer.
En tenant compte de ces réalités nationales, et pour être en cohérence avec les engagements
internationaux (ODD des Nations-unies, Agenda 2063 de l'Union africaine) dans la perspective
de réduction de la pauvreté et des inégalités pour plus d’équité et de justice sociale, la réalisation
d’une étude faisant le point des mécanismes de distribution et de redistribution de revenus et
leurs impacts sur le bien-être des ménages se justifie pleinement.
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Odhd
2. Approche méthodologique
L’approche méthodologique adoptée a comporté les activités suivantes : la revue de littérature
les entretiens individuels avec des experts en la matière ; l’analyse des indicateurs de pauvreté
et d'inégalités sur les données secondaires de l'INSTAT ; de la DGI ; de la DGB et de la
DNTCP. Les analyses quantitatives ont été complétées par celle qualitative des données
primaires collectées par des entretiens individuels visés ci-dessus.
2.1. Revue de littérature
La pauvreté et les inégalités de revenus étant suffisamment documentées aussi bien par
l’administration publique que par le monde de la recherche scientifique et universitaire, la
présente revue de littérature en la matière permet de faire l’état de la question et distinguer les
aspects traités des aspects les moins abordés, les évidences établies des questions qui restent à
résoudre, les acquis des perspectives en matière de redistribution et de lutte contre la pauvreté
et les inégalités par la fiscalité et les transferts, etc. Cet aperçu de la littérature théorique et
empirique a permis d’avoir une idée des orientations politiques, le cadre institutionnel ainsi que
la cartographie des acteurs dans le traitement des problématiques liées à la redistribution des
revenus pour la réduction de la pauvreté et de l’inégalité. Il a permis aussi de mieux orienter
l’analyse des bases de micro-données ainsi que l’élaboration des guides d’entretiens
individuels.
La redistribution par la fiscalité comprend généralement deux (2) types de prélèvement
obligatoire à savoir l’impôt stricto sensu et les charges sociales. L’impôt se subdivise en deux
(2) catégories à savoir l’impôt direct et l’impôt indirect ou taxe.
Les systèmes fiscaux sont périodiquement soumis à des évaluations pour en dresser un état des
lieux en vue de proposer des réformes allant dans le sens de plus d’efficacité et d’équité dans
la répartition de "l’effort contributif" (Guiard, 2012). Selon Concialdi (2013), l'impôt moderne
"a pour finalité de financer les dépenses communes et non pas seulement celle d'une caste de
privilégiés" et "la répartition de l'impôt obéit à un principe simple qui a été formulé par Jean-
Jacques Rousseau (1755) dans son Discours de l'économie politique" et qui se résume à l'idée
principale selon laquelle : "l'impôt devrait frapper le superflu et non le nécessaire". Partant de
là, "on peut évaluer un système de prélèvement en observant qu'une façon simple d'obtenir un
système progressif consiste, d'une part, à exonérer d'impôt le montant des ressources
considérées comme nécessaires et, d'autre part, à taxer, à un taux unique, le total des autres
ressources (excédant ces ressources nécessaires)". La capacité contributive peut être définie
comme étant "la différence entre les revenus et le seuil de ressources nécessaires pour satisfaire
les besoins", seuil qui "représente une part d'autant plus importante des revenus que ces derniers
sont faibles" (Concialdi, 2013). Ainsi, l'évaluation du système de prélèvements dépend de 2
paramètres que sont le seuil d'exonération des revenus, en tant que "indicateur de progressivité
du système" et le taux uniforme de taxation, en tant que "indicateur de redistribution".
Les études d'incidence fiscale utilisent deux (2) principaux critères : (i) l'équité verticale des
taxes qui cherche à savoir si les riches paient une plus grande part de leurs revenus en taxes,
comparativement aux pauvres et (ii) l'équité horizontale dont la question sous-jacente est de
savoir si à revenu égal, les gens sont également taxés.
Un impôt équitable est caractérisé à l’aide de trois (3) rapports (Concialdi, 2013) :
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✓ le rapport des quantités, "toutes choses égales, celui qui a dix fois plus de bien qu'un autre
doit payer dix fois plus que lui" ;
✓ le rapport des usages ou la distinction du nécessaire et du superflu, "celui qui n'a pas le
simple nécessaire ne doit rien payer du tout, la taxe de celui qui a du superflu peut aller
au besoin jusqu'à concurrence de tout ce qui excède son nécessaire" ;
✓ le rapport des utilités que chacun retire de la confédération sociale, "qui protège les
immenses possessions du riche, et laisse à peine un misérable jouir de la chaumière qu'il
a construite de ses mains".
Le prélèvement obligatoire peut être proportionnel ou progressif. Le prélèvement est
proportionnel aux revenus (cotisations sociales et CSG) ou à la dépense (TVA et taxe sur les
produits pétroliers). Il sera dit proportionnel si "on prélève un pourcentage fixe de l'assiette,
quel que soit le niveau de l'assiette" ; ce qui réduit les inégalités dites absolues c’est-à-dire
exprimées en unités monétaires, mais ne change rien aux inégalités relatives mesurées par un
rapport. Un système fiscal est progressif (Concialdi, 2013) si "le taux d'imposition
(impôts/revenu) augmente avec le niveau de revenu", taux pouvant être calculé comme le
rapport de l'ensemble des prélèvements au revenu total (taux moyen) ou "en considérant les
taux de prélèvement appliqués à certaines fractions du revenu (taux marginal)". Kakwani et al.
proposent de comparer "la distribution des revenus avant impôts à la distribution des impôts"
et ainsi "mesurer la déviation d'un système de prélèvements par rapport à la proportionnalité.
Ils suggèrent aussi de "mesurer les effets redistributifs du système de prélèvements en
comparant les distributions de revenus avant et après impôts", ce qui relève davantage de l'effet
redistributif que de la progressivité. Autrement dit, un impôt est dit progressif "si le taux moyen
de prélèvement sur le revenu des contribuables, du fait de cet impôt, augmente avec leur revenu"
(FIPECO, 2016). C’est le cas de l'ITS. Il est proportionnel "si son taux moyen est constant",
comme c'est le cas de la TVA ou de l'IS et dégressif "s'il diminue avec le revenu des
contribuables". C'est le cas de l'impôt forfaitaire ou de la TDRL.
Soit un impôt progressif I avec R0 le seuil de revenu auquel l'impôt I0=0. Supposons :
✓ entre R0 et R1, l'impôt est de I1= (R1 – R0) t1
✓ entre R1 et R2, l'impôt est de I2= (R2 - R1) t2
✓ entre Rj-1 et Rj, l'impôt est de Ij= (Rj – Rj-1) tj
✓ et si le revenu R du contribuable est dans cette limite, alors son tmi est de tj% et son impôt
à payer est de: ( )
jj
j
k
k tRRII 1
1
0
−
−
=
−+= avec un taux moyen d'imposition de
R
I
t = .
La progressivité du système fiscal peut se détecter par la comparaison des taux moyens
d'imposition mais "le niveau et la variation des taux d'imposition tout au long de l'échelle des
revenus dépendent du taux global moyen d'imposition" et "plus le taux global de prélèvement
est faible, plus un système d'imposition pourra être potentiellement progressif et inversement".
En plus, "un taux de prélèvement de 10% par exemple sur les plus bas revenus peut être plus
difficile à supporter qu'un taux de prélèvement de 20% pour les plus hauts revenus" (Concialdi,
2013). Une autre méthode de mesure de la progressivité (FIPECO, 2016) est de "classer les
ménages par quantiles (déciles, centiles, etc.) de revenus croissants et vérifier que le taux moyen
de prélèvement sur leurs revenus augmente d'un quantile au suivant". Le degré de progressivité
peut être associé à la concentration de l'impôt "dans le haut de la distribution des revenus" même
s'il peut arriver que l'impôt soit concentré sans être progressif.
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Si la plupart des impôts directs ont des barèmes nominaux progressifs, le principal impôt
indirect qu’est la TVA ou son équivalent dans certains pays est généralement dégressif de fait.
En effet, bien que son taux soit uniforme sur la valeur des achats des produis concernés, le
rapport de la TVA au revenu décroit du fait que "le taux d'épargne des ménages croit avec leur
revenu et donc que la part de la consommation décroit" (FIPECO, 2016). Pour cette raison et
bien d’autres, le système fiscal dans son ensemble pourrait se retrouver non progressif ou, dans
le pire des cas, dégressif.
En matière d’analyse d’incidence fiscale, le taux marginal d’imposition (tmi), à ne pas
confondre avec le taux moyen d’imposition, serait un indicateur pertinent du coût économique
de l'impôt (FIPECO, 2016). Le taux moyen d'imposition "désigne le pourcentage que représente
l'impôt par rapport au revenu imposable" (Boluze, 2020) alors que le taux marginal d'imposition
(tmi) se définit comme le taux auquel est imposée la dernière tranche du revenu d'un
contribuable. C’est généralement le taux le plus élevé auquel est imposé un contribuable au titre
de son impôt sur le revenu. "L'impôt étant calculé selon un barème progressif qui est composé
de plusieurs tranches d'imposition, toutes les tranches du barème sont composées d'une limite
basse et d'une limite haute et se voit appliquer un taux progressif d'impôt. Si le revenu d'un
contribuable est compris entre la limite haute et la limite basse d'une tranche, la différence entre
son revenu imposable et la limite basse est taxée au taux de cette tranche. Ce taux correspond
ainsi au taux marginal d'imposition du contribuable".
A titre d’exemple illustratif (Boluze, 2020), considérons une personne qui a 350 unités
monétaires (um) de revenu imposable dans les conditions suivantes :
✓ aucun impôt jusqu'à 100 um
✓ 11% d'impôt de 100 à 300 um, soit un impôt de (300-100)11% = 22 um
✓ 30% d'impôt pour plus de 300 um, soit un impôt de (350-300)30% = 15 um
✓ soit un impôt total de 22+15 = 37 um.
Le taux marginal d’imposition (tmi) est de 30% correspondant au taux auquel est imposée la
dernière tranche de son revenu alors que le taux moyen d'imposition est de 10.57% = 37/350.
Dans la littérature, quelques résultats d’études de cas de systèmes fiscaux (Concialdi, 2013)
montrent que :
✓ "le taux d'imposition augmente avec le revenu mais dans des proportions relativement
faibles"
✓ "en proportion des capacités contributives, le prélèvement fiscal diminue fortement à
mesure que les revenus augmentent", en d'autres termes, "l'effort contributif est bien plus
élevé pour les bas revenus que pour les plus hauts revenus et ce constat reste valable
même pour le millième d'individus aux plus hauts revenus dont l'effort contributif est
d'environ 33%"
✓ "l'effort contributif atteint ou dépasse 100% pour les 5% ou 10% de ménages aux plus
faibles niveaux de vie, ce qui signifie, dans la logique de ce calcul, que ces ménages ne
disposent pas de ressources suffisantes pour sortir de la pauvreté"
✓ "l'effort contributif diminue ensuite régulièrement tout au long de l'échelle des niveaux
de vie pour atteindre son minimum pour les 5% de ménages au niveau de vie le plus
élevé".
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De même, Bird et Miller (1989) trouvent qu’en France, les taxes sur le transport sont
progressives le long du revenu de l'échantillon et que les taxes sur les produits alimentaires sont
les plus régressives du système fiscal. Ces deux catégories (transport et produits alimentaires)
comptent pour 64% des taxes totales. L’importance des taxes sur les produits alimentaires
s’explique non pas par des taux élevés mais du fait que ces produits comptent pour une large
proportion des dépenses de consommation des groupes les plus pauvres de la société. L'alcool
et le tabac comptent pour 16.5% des taxes estimées alors qu'ils comptent pour 2% des dépenses.
Les trois (3) catégories (alcool, tabac et transport) cumulées comptent pour 43.6% des taxes
payées par les pauvres contre 8% de leurs dépenses. 37% des taxes vont aux produits
alimentaires et les taxes sur les produits alimentaires comptent pour 42% des taxes sur les
ménages ruraux contre 32% sur les ménages urbains. Par contre, les taxes de transport comptent
pour 36% des taxes des ménages urbains contre 20% de ceux des ménages ruraux.
Des résultats sur les données de la Jamaïque révèlent que les principales taxes affectant les
pauvres sont les taxes indirectes. Le système de taxe indirecte compte seulement pour 6% de la
dépense totale des faibles revenus et ces taxes sont probablement mieux caractérisées comme
proportionnelles aux dépenses des faibles revenus. De façon générale, la littérature sur
l'incidence des taxes sur la consommation et droits d'accises stipule que "les consommateurs
supportent ces taxes précisément en proportion de leurs achats des biens taxables" (Bird et
Miller, 1989).
Au Mali, le Décret n° 02-329/P-RM du 05 juin 2002 fixe les taux en matière d'impôt spécial
sur certains produits:
✓ 20% pour les noix de kola
✓ 10% pour les boissons gazeuses et eaux aromatisées,
✓ 45% pour les boissons alcoolisées
✓ 25% pour le tabac, les cigarettes et cigares
✓ 15% pour le parfum et la cosmétique
✓ 45% pour les armes et munitions
✓ 3% pour les produits nationaux miniers.
Dans la recherche d’équité et de justice sociale dans les systèmes fiscaux nationaux, l’un des
débats les plus importants porte sur la taxation des plus hauts revenus (Concialdi, 2013). Les
principales questions de recherche qui reviennent dans ces débats sont, entre autres : "à partir
de quel niveau de rémunération peut-on parler de hauts revenus ?", et "comment apprécier le
niveau de taxation de ces revenus élevés ou, plus généralement, le degré de progressivité de
notre système de prélèvements", que valent l'équité et la progressivité du système fiscal ?
Le débat sur la taxation des millionnaires porte sur le taux marginal c’est-à-dire le "taux
d'imposition concernant la fraction de revenu excédant le million" mais il faut garder à l'esprit
que "l'impact de ces taux marginaux dépend très étroitement de la définition des tranches de
revenus auxquels ils sont associés" d'autant plus que "la progressivité de l'impôt est
fréquemment visible à travers la progressivité du barème d'imposition associant à des tranches
de revenus de plus en plus élevées des taux marginaux d'imposition de plus en plus élevés"
(Concialdi, 2013).
Par exemple, en supposant un pays avec un revenu total de 4000 milliards FCFA, accaparé par
un seul individu sur une population de 20 millions d'habitants, avec un seuil de pauvreté de 50
mille FCFA, il faudrait prélever le quart du revenu de notre seul individu pour porter toute la
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population au seuil de pauvreté. Le même résultat peut être obtenu par la fiscalité, soit en
appliquant à tout le revenu de l'individu un taux de taxation uniforme de 25%, soit en exonérant
les trois quarts de son revenu et en taxant le quart supérieur restant au taux de 100%. Le résultat
est le même sauf que dans le second cas de taxation, "le barème d'imposition rendrait visible le
caractère prétendument 'confiscatoire' de l'impôt".
"Les prélèvements obligatoires sont progressifs en France avec un taux moyen qui croit de
moins 25% pour les trois premiers déciles jusqu'à plus de 35% au-delà du 8ème décile. Ils sont
toutefois dégressifs en bas de l'échelle des revenus (entre le 1er et le 2ème décile) du fait des
impôts indirects et au sommet de l'échelle des revenus (les 40'000 ménages ayant les plus hauts
revenus du fait de l'impôt sur le revenu").
2.2. Analyse des données secondaires
Il s’agit d’analyser d’abord les bases de données existantes par le calcul et l’interprétation de
divers indicateurs en matière de distribution, de redistribution et de ses effets sur l’inégalité de
revenu et la pauvreté. En d'autres termes, l’analyse des données secondaires consiste
essentiellement à utiliser séparément ou en combinant les bases de micro-données et de données
administratives pour calculer, d’une part, des indicateurs d’inégalités dans la distribution du
revenu et, d’autre part, des indicateurs de mesure des effets de la redistribution par les dépenses
publiques et les impôts et taxes sur l’inégalité de revenu et la pauvreté. Les principales bases
de données en vue sont celles des enquêtes budget-consommation (EMOP – Enquête modulaire
et permanente auprès des ménages), des TOFE (Tableau des opérations financières de l'Etat) et
des lois de finances. Dans un premier temps, les indicateurs d'inégalités sont établis et mesurés,
ensuite ceux de la pauvreté, surtout monétaire. Enfin l'on établit les indicateurs de mesure de la
progressivité de la redistribution du revenu ainsi que l'effet redistributif du système fiscal et des
transferts publics.
2.2.1. Mesures des inégalités
On distingue trois grandes classes de mesures des inégalités, à savoir (i) les mesures statistiques
de dispersion, (ii) les indices d'entropie généralisée et (iii) les indices Atkinson-Kolm-Sen (voir
Annexe pour les formules).
Le coefficient de Gini comme première mesure de dispersion est un nombre variant de 0 à 1,
où 0 signifie l'égalité parfaite et 1 signifie l'inégalité totale, est très utilisé pour mesurer
l'inégalité des revenus dans un pays et sert de mesure de l'inégalité économique, ce en quoi il
est équivalent à l'écart moyen relatif (l'écart moyen divisé par la moyenne pour le mettre à
l'échelle). Associé à la courbe de Lorenz qui représente la part cumulée des revenus en fonction
de la part cumulée de la population, il se calcule par rapport à la fonction qui associe à chaque
part de la population touchant un revenu classé par ordre croissant, la part que représentent ses
revenus.
Ainsi, le coefficient de Gini est égal à la différence entre 1 et le double de l'intégrale de la
fonction représentée par la courbe de Lorenz. En pratique, on ne dispose pas de cette fonction,
mais du revenu par "tranches" de population e.g. par déciles1 ou centiles.
1 Alvaredo, F., Chancel, L., Piketty, T., Saez, E., Zucman, G. (2018) définissent la classe moyenne comme étant
"les 40% qui se situent entre les 50% du bas et les 10% du haut".
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Les rapports de quantiles ou ratios de dispersion des quantiles e.g. P90/P10 ou P80/P20 comme
mesure de dispersion statistique sont très souvent utilisés pour mesurer les inégalités. Il faut
rappeler que les quantiles divisent la population en un nombre q de sous-groupes de taille égale
dans un classement par ordre croissant du revenu. Les parts du revenu total détenues par chaque
groupe, les revenus minimal, maximal ou moyens de chaque groupe ainsi que les rapports inter-
quantiles donnent des indications sur l’inégalité dans la distribution du revenu.
Les indices d'entropie généralisée (Flückiger et al, 2005) prennent la forme générale et font
apparaître un paramètre d'aversion à l'inégalité représentant "le poids donné aux distances des
valeurs de la variable d’intérêt à différents points de sa distribution" (Abdelkhalek, T., Ejjanoui,
F., 2012) telles que :
• "pour les valeurs les plus faibles de ce paramètre, la mesure GE est plus sensible dans la
région inférieure de la distribution ;
• "pour des valeurs plus élevées, la mesure GE est plus sensible aux changements qui
affectent la région supérieure".
A l'instar des indicateurs de pauvreté, les mesures de l'inégalité doivent satisfaire un certain
nombre de propriétés ou axiomes (Flückiger, Y., Naga, R.N., 2005):
✓ l'homogénéité de degré zéro pour les observations i.e. l'inégalité doit être indépendante
de la moyenne de la variable sur les observations ;
✓ l'indépendance de la taille de la population ou invariance à l'échelle ;
✓ la symétrie, l'inégalité doit restée inchangée si deux individus s'échangent leurs revenus ;
✓ la sensibilité au transfert (principe des transferts de Pigou et Dalton) : l'inégalité doit
baisser si un transfert a lieu d'un riche vers un pauvre ou d'un donateur mieux nanti vers
un bénéficiaire moins nanti, et inversement ;
✓ la décomposabilité ou la possibilité de décomposer la population en sous-groupes..
Les groupes de décomposition possibles sont la région administrative du pays, le milieu de
résidence (urbain/rural ou capitale/autre urbain/rural), la taille du ménage, la catégorie
socioprofessionnelle, l'éducation, l'âge ou la génération.
2.2.2. Mesures de la pauvreté
Actuellement dominante et privilégiée par la Banque mondiale, l'approche monétaire de la
pauvreté mesure la pauvreté par le revenu ou la dépense. Dans cette approche, dite FGT (Foster-
Greer-Thorbecker), l’un des éléments fondamentaux de la mesure de la pauvreté est le seuil de
pauvreté i.e. le niveau de revenu ou de consommation critique en dessous duquel un individu
ou un ménage est dit pauvre. Dans les applications empiriques au Mali, ce seuil est défini, au
plan national, par un niveau de dépense et non de revenu or nous privilégions dans cette étude
le revenu auquel cas, le seuil de pauvreté devra être recalculé de sorte à conserver les mêmes
ménages pauvres et par la dépense et par le revenu.
L'utilisation des indices P0, P1 ou P2 obtenus à partir de l’indicateur FGT (voir Annexe) n'est
pas neutre en matière de politique de lutte contre la pauvreté :
P0 donner aux pauvres les plus proches du seuil de pauvreté, pour avoir moins de pauvres
P1 donner indifféremment aux pauvres qu'ils soient proches ou non du seuil de pauvreté
P2 donner aux pauvres les plus éloignés du seuil de pauvreté.
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Il faut éviter de porter un jugement sur la politique économique sur un seul indicateur e.g. P0
peut augmenter mais P2 diminuer si la politique a essentiellement visé les plus pauvres des
pauvres.
2.2.3. Mesure de la progressivité de la redistribution
Les premières analyses de la progressivité sont basées sur des comparaisons entre courbes de
Lorenz et/ou courbes de concentration. Les résultats des comparaisons sont sans équivoque
lorsque ces courbes ne se croisent pas. Dans les cas où les courbes de Lorenz et de concentration
se croisent, il y a lieu de faire recours à des indices quantitatifs résumant l’ampleur de la
progressivité. Parmi ceux-ci, l'on retiendra (i) l'indice MT de Musgrave et Thin, (ii) l'indice K
de progressivité de Kakwani, et (iii) l'indice RS de Reynolds-Smolensky. Les détails sur ces
différents indices ainsi que leurs interprétations sont données dans l’annexe.
2.2.4. Effet redistributif du système d'impôts et de transferts
L’objectif principal de tout système fiscal et de transferts est de redistribuer les revenus bruts
issus du système de production. Il s’agit de réduire l’inégalité globale dans la distribution du
revenu brut par le prélèvement d’impôts et taxes et en faisant des transferts selon certains
critères bien définis. L’inégalité globale dans la distribution du revenu net généré par le système
fiscal et de transfert, devrait être moindre, comparativement à celle observée dans la distribution
du revenu brut. C’est à cette condition que le système fiscal et de transferts est efficace. Pour
cela, il devrait obéir au critère de justice redistributive qui requiert le respect des principes
d’équité verticale et d’équité horizontale ou d’absence de reclassement.
L’équité verticale (VE) d’un système fiscal et de transferts est sa tendance à comprimer la
distribution des revenus nets après impôts et transferts. Elle correspond à la réduction des écarts
entre les individus/ménages inégaux dans la distribution du revenu brut. L’équité horizontale
classique (HE) demande que des revenus avant impôts identiques soient traités identiquement
par le système fiscal et de transferts. C’est le principe du traitement égal des égaux. L’équité de
reclassement (RE) fait référence à la faculté du système à produire un classement des
individus/ménages (dans la distribution des revenus nets) différent de celui déjà observé dans
la distribution du revenu brut. L’absence de reclassement correspond à l’équité horizontale et
vices versa.
L’effet redistributif total (la réduction d’inégalité) du système fiscal et de transferts se mesure
par la différence entre la valeur de l’indice de Gini du revenu brut et celle de l’indice de Gini
du revenu net ( )NB GG − . Cet effet global se décompose en un effet équité verticale et un effet
reclassement. Plus l’effet équité verticale est grand, plus la réduction d’inégalité opérée par le
système est importante. Plus l’effet reclassement est grand, plus la réduction d’inégalité
produite par le système est faible. Le reclassement a tendance à réduire l’effet redistributif du
système fiscal et de transferts, contrairement à l’équité verticale:
( ) ( )
classement
NN
verticaleEquité
NBNB CGCGGG
Re
−−−=−
Il faut cependant noter que, selon FIPECO (2016), cette méthode a des limites à savoir :
✓ "les cotisations sociales de retraite et d'assurance chômage sont dégressives parce qu'elles
sont plafonnées, mais les prestations auxquelles elles donnent droit sont elles-mêmes
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plafonnées", ainsi les effets de ces régimes "sur la distribution des revenus ne peuvent
être appréciés qu'en examinant simultanément les cotisations et les prestations"
✓ la mesure de la redistribution par les prélèvements obligatoires "ignore l'incidence réelle
des prélèvements obligatoires car elle suppose qu'ils sont entièrement supportés par ceux
qui en sont juridiquement redevables".
2.3. Collecte de données qualitatives
Des données primaires ont été collectées par des entretiens individuels auprès de certains
responsables choisis en raison de leurs expertises ou de leur implication dans la gestion, au
niveau national, des problématiques de taxation, de transferts publics, de la pauvreté et des
inégalités. La collecte de telles données qualitatives se fait sous forme de KII (Key informant
interviews) auprès de certaines catégories de personnes. En règle générale, la méthode des
informateurs clés repose sur des personnes représentant une institution et sont sélectionnées
parce qu'elles jouent un rôle important lié à la thématique de l’étude ou parce qu'elles ont des
connaissances particulières, décideurs, leaders d'opinion, fournisseurs de services, etc. Les
données ainsi obtenues sont analysées par des méthodes d’analyse qualitative appropriées afin
de compléter les analyses quantitatives des données secondaires, voire de mieux les
contextualiser.
Les interviews ont été faites auprès de 13 informateurs clés de 12 structures (voir liste en
annexes). Le guide d’entretien est structuré en cinq (5) sections à savoir : (a) le revenu et les
dépenses ; (b) la pauvreté et les inégalités de revenu ; (c) les impôts et taxes ; (d) les transferts
publics et privés ; et (c) la protection sociale. La liste des structures ayant participé aux
interviews comprend :
✓ la DNPD ;
✓ la CT/CSLP ;
✓ la DNTCP ;
✓ la CMSS ;
✓ la DGB ;
✓ la DNDS ;
✓ l'ODHD/LCP ;
✓ la CANAM ;
✓ l'INPS ;
✓ un expert indépendant ;
✓ l'IERGGM ;
✓ le CNPM.
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3. Niveau et structure du revenu
Cette section livre une analyse plus ou moins complète du niveau et de la structure du revenu.
Le revenu total étant tiré de différentes sources, il importe d’analyser l’importance relative de
chaque source à des fins de propositions de politiques publiques et à des fins de comparaisons
avec des données d’autres pays. Les différentes sources de revenu sont d’abord spécifiées et
leurs parts respectives dans le revenu total sont ensuite analysées. Finalement, la structure du
revenu est analysée selon un certain nombre de déterminants sociodémographiques.
3.1. Sources des revenus
Dans les données EMOP, on peut distinguer trois (3) grandes sources de revenu. Ce sont le
travail, le capital et les transferts. Le revenu du travail comprend les salaires et le revenu
d’activité des indépendants qui peuvent être agricoles ou non agricoles. Le revenu du capital
est subdivisé en revenu de propriété (d’actifs physiques) et revenu financier tiré d’actifs
financiers. Le revenu de transfert comprend les transferts publics (de l’Etat aux ménages) et les
transferts privés (entre ménages). Dans les transferts publics on distingue les bourses, les
transferts au titre de la sécurité sociale et les pensions. Les transferts privés sont composés des
transferts reçus des autres ménages de l’intérieur ou de l’extérieur du pays, des revenus tirés de
la mendicité et d’autres formes de transferts privés.
Au Mali, les revenus sont généralement de niveaux faibles et sont essentiellement tirés des
facteurs de production, particulièrement du travail. Selon les interviews, seules quelques
catégories sociales privilégiées s’en sortent. Ce sont les commerçants et les salariés formels de
l’État, du secteur privé et des organisations internationales. La grande majorité, constituée des
indépendants agricoles, des artisans et des travailleurs informels, gagne généralement des
revenus à peine suffisant pour couvrir ses besoins.
3.2. Structure du revenu global
Le revenu annuel total de l’ensemble du pays est estimé en 2019 à 3978 milliards de FCFA
dont 91% de revenu du travail, 7% de transferts et 2% de revenu de capital. La plus grande part
du revenu est donc tirée du travail, suivi de loin par les transferts, le revenu procuré par le
capital ayant la plus faible part. Cette structure varie quelque peu selon le milieu et la région
administrative. Les 1583 milliards de revenu du milieu urbain comprennent
proportionnellement moins de revenu du travail (88%) que dans l’ensemble. Cette diminution
de la part du revenu du travail se fait au prix d’une augmentation de celle des transferts (9%) et
dans une moindre mesure de celle du revenu du capital (3%). A l’intérieur du milieu urbain, le
district de Bamako comprend un peu moins de revenu du travail (87%) mais un peu plus de
revenu du capital (4%). Les autres villes du pays ont la même structure de revenu que
l’ensemble du milieu urbain. En milieu rural, la part du travail (93%) dans les 2 395 milliards
de FCFA de revenu total augmente quelque peu au détriment des transferts (6%) et du revenu
du capital (1%), par rapport à l’ensemble du pays.
Dans les régions administratives couvertes par l’édition 2019 des enquêtes EMOP,
comparativement au pays dans son ensemble, la part du revenu du travail augmente à Koulikoro
(97%), Ségou (96%) et Mopti (94%) ; diminue à Sikasso (87%), Tombouctou (79%), Gao
(87%) et dans le district de Bamako (87%). A Kayes (91%), cette part reste à peu près au même
niveau que dans l’ensemble. La part des transferts diminue généralement dans les régions où la
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part du revenu du travail a augmenté, 3% à Koulikoro, 4% à Ségou et 5% à Mopti. On note une
plus grande part du revenu du capital à Tombouctou (13%), à Kidal (11%) et dans une moindre
mesure à Bamako (4%). Au contraire, la part du revenu du capital devient négligeable à Kayes,
Koulikoro, Ségou et Gao.
Tableau 1. Structure du revenu annuel selon le milieu et la région (en %)
Revenu du travail Transfert total Revenu du capital
Revenu total
(milliards FCFA)
Milieu
Urbain dont 88 9 3 1 583
Bamako 87 9 4 967
Autre urbain 88 9 3 615
Rural 93 6 1 2 395
Région
Kayes 90 10 0 520
Koulikoro 97 3 0 355
Sikasso 90 9 1 675
Ségou 96 4 0 545
Mopti 94 5 1 553
Tombouctou 79 8 13 159
Gao 91 9 0 149
Kidal 82 7 11 54
Bamako 87 9 4 967
Total 91 7 2 3 978
Source : Calculs à partir des données EMOP 2019
Les 3513 milliards de FCFA de revenu total des hommes sont tirés du travail à 90%, des
transferts à 7% et du capital à 2%. Cette structure diffère quelque peu de celle observée pour
les femmes soit 86% de revenu du travail, 11% de transferts et 3% de revenu du capital pour
un total de 465 milliards FCFA annuels. Si le travail pèse légèrement plus chez les hommes que
chez les femmes, en revanche le poids des transferts est sensiblement plus important dans le
revenu total des femmes que dans celui des hommes.
Le poids du revenu du travail diminue globalement à mesure que le niveau d’instruction
augmente, 91% pour les sans instructions et au fondamental 2,86% au secondaire et plus. La
seule exception à cette tendance se trouve au fondamental 1 où le poids du revenu du travail
augmente par rapport aux sans instructions. Au contraire, la part des transferts augmente
globalement avec le niveau d’éducation, passant de 7% pour les sans instruction à 8% au
fondamental 2 puis à 12% au secondaire et plus. La part du revenu du capital ne varie pas
beaucoup avec le niveau d’éducation (1% jusqu’au fondamental 2) même si elle est plus
importante au secondaire et au-delà (3%).
Tableau 2. Structure du revenu total selon le sexe et le niveau d’éducation (en %)
Revenu annuel du
travail
Transfert total
annuel
Revenu annuel
du capital
Revenu total
(milliards FCFA)
Sexe
Homme 91 7 2 3 513
Femme 86 11 3 465
Éducation
Aucun 91 7 2 2 487
Fondamental 1 93 6 1 556
Fondamental 2 91 8 1 364
Secondaire+ 86 12 3 560
Total 91 7 2 3 978
Source : Calculs à partir des données EMOP 2019
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3.3. Structure du revenu du travail
Le revenu total du travail s’élève à 3 614 milliards de FCFA, réparti entre le salaire (18%), le
revenu des travailleurs indépendants agricoles (46%) et le revenu des travailleurs indépendants
non agricoles (37%). Cette structure change quelque peu selon le milieu, la région, le sexe et le
niveau d’éducation.
Les 1 388 milliards de revenu d’activités du milieu urbain proviennent du salaire à 39%, des
indépendants agricoles pour 10% et des indépendants non agricoles pour un peu plus de la
moitié (52%). En milieu rural, le revenu d’indépendant agricole a la plus grande part avec plus
des deux tiers (68%) du revenu du travail de ce milieu, suivi du revenu d’indépendant non
agricole avec 27%. Le salaire pèse peu dans le revenu du travail du milieu rural avec seulement
5% du revenu total tiré du travail.
Dans les régions administratives, le salaire a une part plus importante que dans l’ensemble à
Bamako (47%) et dans une moindre mesure à Kidal (36%). La part du salaire est plus faible
que dans l’ensemble à Ségou (4%), Mopti (5%), Kayes (6%), Koulikoro (11%), Sikasso (12%)
et Tombouctou (12%). A Gao (17%), la part du salaire est à peu près la même que dans
l’ensemble.
Tableau 3. Structure du revenu du travail selon le milieu et la région (en %)
Salaire
annuel
Revenu annuel
indépendant
agricole
Revenu annuel
indépendant non
agricole
Revenu annuel du
travail (milliards
FCFA)
Milieu
Urbain dont 39 10 52 1 388
Bamako 47 2 52 841
Autre urbain 26 22 52 547
Rural 5 68 27 2 226
Région
Kayes 6 63 31 467
Koulikoro 11 68 21 345
Sikasso 12 55 32 607
Ségou 4 67 28 525
Mopti 5 63 32 523
Tombouctou 12 17 71 125
Gao 17 46 37 137
Kidal 36 4 60 44
Bamako 47 2 52 841
Total 18 46 37 3 614
Source : Calculs des auteurs à partir des données EMOP 2019
Le revenu du travail total des hommes s’élève à 2 046 milliards de FCFA par an. Il se répartit
entre le revenu d’indépendants agricoles pour un peu moins de la moitié (45%), l’autre moitié
comprenant le revenu d’indépendants non agricoles (33%) et le salaire (21%). Les 1 569
milliards de revenu annuel du travail des femmes ont de plus grandes parts de revenu
d’indépendants, agricoles (46%) comme non agricoles (41%), comparativement aux hommes.
En revanche, la part du salaire (13%) y baisse quelque peu.
La structure du revenu du travail, selon le niveau d’éducation, montre que la part du salaire
augmente progressivement avec le niveau d’éducation, partant de 5% pour les personnes sans
instruction formelle à 83% pour le secondaire et plus, en passant par 17% pour le fondamental
1 et 64% pour le "fondamental 2". Au contraire, la part du revenu d’indépendant agricole baisse
progressivement avec le niveau d’éducation ; soit 57% pour les "sans instruction", 40% pour le
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"fondamental 1", 11% pour le "fondamental 2" et moins de 1% pour le secondaire et plus. La
part du revenu d’indépendants non agricoles augmente entre le niveau "aucun" (37%) et le
niveau "fondamental 1" (43%) mais baisse ensuite au fondamental 2 (26%) et au secondaire et
plus (17%).
Tableau 4. Structure du revenu du travail selon le sexe et le niveau d’éducation (en %)
Salaire
annuel
Revenu annuel
indépendant
agricole
Revenu annuel
indépendant non
agricole
Revenu annuel du
travail (milliards
FCFA)
Sexe
Homme 21 45 33 2 046
Femme 13 46 41 1 569
Education
Aucun 5 57 37 2 169
Fondamental 1 17 40 43 934
Fondamental 2 64 11 26 311
Secondaire+ 83 0 17 200
Total 18 46 37 3 614
Source : Calculs à partir des données EMOP 2019
3.4. Évolution de la structure des revenus
Sur la période 2015-2019, le revenu total est passé de 2 106 milliards FCFA en 2015 à 2 070
milliards en 2016 ; 3 447 milliards en 2017 ; 3 012 milliards en 2018 puis à 3 984 milliards en
2019. Cette tendance est globalement à la hausse à l’exception de 2016 et 2018 où on constate
de légères baisses par rapport aux années précédentes.
La part du revenu tiré du travail diminue entre 2015 et 2017 mais augmente entre 2017 et 2019.
La part des transferts suit une tendance inverse soit une augmentation entre 2015 et 2017 et une
baisse entre 2017 et 2019. Quant au revenu tiré du capital, sa part (2%) est restée constante
durant toute la période.
Tableau 5. Évolution de la structure du revenu total (en %)
2015 2016 2 017 2018 2019
Revenu annuel du travail 88 87 86 88 91
Transfert total annuel 10 11 12 10 7
Revenu annuel du capital 2 2 2 2 2
Revenu total (milliards FCFA) 2 106 2 070 3 447 3 012 3 984
Source : Calculs des auteurs à partir des données EMOP
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4. Distribution, pauvreté et inégalité de revenu
Cette section traite du niveau de pauvreté et d’inégalité dans la distribution du revenu avant
toute politique de redistribution. Les indices FGT usuels de pauvreté sont analysés suivant des
caractéristiques sociodémographiques (milieu de résidence, région, sexe, niveau d’éducation).
Les mêmes analyses sont faites de l’indice d’inégalité le plus connu à savoir l’indice de Gini.
La section finit par la décomposition de la pauvreté et de l’inégalité entre différents groupes
sociodémographiques compte tenu de leurs niveaux internes de pauvreté respectivement
d’inégalité et de leur poids démographique.
La pertinence de l’analyse de la pauvreté et de l’inégalité ressort dans des résultats des
entretiens réalisés auprès d’informateurs clés. Il s’agit des conséquences néfastes que peuvent
avoir des niveaux élevés de pauvreté et d’inégalité de revenu à savoir, entres autres :
✓ l’apparition de troubles sociaux et des cas de violences et de conflits armés ;
✓ la montée du banditisme et de la délinquance ;
✓ l’émigration massive de la jeunesse ;
✓ l’insécurité alimentaire / la famine ;
✓ l’instabilité politique ;
✓ le faible accès aux services sociaux de base (santé, éducation, eau potable, assainissement,
etc.) ;
✓ la mendicité.
4.1. Répartition du revenu
Les 3 614 milliards FCFA de revenu sont répartis entre les régions administratives, les zones
de résidence, les 2 sexes et les différents niveaux d’éducation. Les parts de revenus obtenues
sont rapportées aux parts correspondantes de population pour apprécier leurs importances
relatives à travers un ratio.
De toutes les régions administratives, les plus grandes parts de revenu reviennent au district de
Bamako (24%) et aux régions de Sikasso (17%), Ségou (14%), Mopti (14%) et Kayes (13%).
Cependant, en tenant compte des populations respectives, la région de Kidal a la meilleure
situation avec une part de revenu équivalent à près de 3 fois (2.7) sa part de population. Le
district de Bamako vient en deuxième position avec une part de revenu qui vaut 2 fois sa part
de population. Les autres régions gagnent au plus l’équivalent de leur part de population avec
des ratios inférieurs ou égaux à 1.
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Tableau 6. Parts de revenu total et de population
Part de revenu total
(%)
Part de Population
(%)
Ratio part revenu/part
population
Région
Kayes 17 13 1.0
Koulikoro 14 16 0.6
Sikasso 14 18 0.9
Ségou 4 16 0.8
Mopti 4 14 1.0
Tombouctou 1 5 0.9
Gao 24 4 1.0
Kidal 17 0.5 2.7
Bamako 14 13 1.8
Milieu
Urbain 40 26 1.5
Bamako 24 13 1.8
Autre urbain 15 13 1.2
Rural 60 74 0.8
Sexe
Homme 88 56 1.0
Femme 12 44 1.0
Éducation
Aucun 63 68 0.9
Fondamental 1 14 25 1.0
Fondamental 2 9 5 1.9
Secondaire+ 14 2 3.0
Total 3 978 milliards
FCFA
20 281 602 hts 1.0
Source : Calculs des auteurs à partir des données EMOP 2019
Le milieu urbain gagne au total une fois et demie sa part de population, contrairement au milieu
rural dont la part de revenu est inférieure à la part de population. Les parts de revenus et les
parts de population sont comparables pour les 2 sexes avec des ratios de 1. Ces résultats sont
confirmés par ceux des entretiens qualitatifs desquels il ressort que parmi les catégories sociales
les plus touchées par la pauvreté, il y a les ruraux et les femmes. Les personnes sans aucun
niveau d’instruction gagnent moins que leur poids démographique, tout le contraire des
personnes de niveau secondaire et supérieur dont les revenus valent respectivement 1.9 fois et
3 fois leurs populations. De façon générale, le ratio part de revenu sur part de population
augmente avec le niveau d’instruction, de 0.9 à 3 en partant du niveau "aucun" au niveau
"supérieur".
Les revenus moyens et les parts de revenu des déciles indiquent une certaine inégalité dans la
distribution du revenu total. Le revenu moyen d’ensemble est de 196 456 FCFA. Il varie de
30532 FCFA dans le décile le plus pauvre à 456 611 FCFA dans le décile le plus riche.
Autrement dit, le revenu moyen d'une personne des 10% les plus riches vaut 15 fois celui d'une
autre personne des 10% les plus pauvres. Aucun des 6 premiers déciles ne gagne l’équivalent
de son poids démographique (10%). Il faut aller jusqu’au septième décile pour que la part de
revenu atteigne au moins 10% alors que le décile le plus riche gagne près de 2 fois et demie sa
part de population. La part de revenu du dernier décile dépasse la part de revenu des 4 premiers
déciles réunis (les 40% les plus pauvres).
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Tableau 7. Déciles de revenu total
Revenu moyen (FCFA) Part de revenu total (%)
Décile 1 30 532 2
Décile 2 98 122 5
Décile 3 129 078 7
Décile 4 154 187 8
Décile 5 177 277 9
Décile 6 185 468 9
Décile 7 216 782 11
Décile 8 251 820 13
Décile 9 264 686 13
Décile 10 456 611 23
Total 196 456 100
Source : Calculs à partir des données EMOP 2019
La distribution du revenu total, entre différentes catégories sociales, a changé quelque peu entre
2015 et 2019. Les catégories vulnérables telles que les ruraux, les femmes et les 40% les plus
pauvres ont connu diverses fortunes au cours de la période. La part de revenu total des ruraux
a alterné des hausses et des baisses entre 60% en 2019, son niveau minimal de la période et
69% en 2018, son niveau maximal de la période. La part des femmes est faible et varie entre
7% en 2015 et 2018, son niveau minimal de la période, et 26% en 2017, son niveau maximal
de la période. La part de revenu total des 40% les plus pauvres n’a pas atteint le quart (25%)
durant la période considérée (2015-2019). Son évolution montre aussi une alternance de baisses
et de hausses, entre un minimum de 9% en 2016 et un maximum de 23% en 2019. Au regard
de l’évolution du ratio de Palma qui est le rapport de la part des 10% les plus riches sur celle
des 40% les plus pauvres, il ressort que le niveau d’inégalité dans la distribution du revenu entre
ces 2 catégories sociales est important et évolue en "dents de scie". En effet, les 10% les plus
riches gagnent au moins à peu près autant que les 40% les plus pauvres (2017 et 2019).
L’inégalité entre les deux (2) catégories sociales atteint souvent des niveaux excessifs quand la
part des 10% les plus riches atteint 3.2 fois (en 2016), 2.4 fois (en 2018) ou 1.8 fois (en 2015)
la part des 40% les plus pauvres.
Tableau 8. Évolution de la distribution du revenu total (en %)
2015 2016 2017 2018 2019
Milieu
Urbain 32 35 35 31 40
Bamako 15 15 21 13 24
Autre urbain 16 19 15 18 15
Rural 68 65 65 69 60
Sexe
Homme 93 85 74 93 88
Femme 7 15 26 7 12
Niveau de vie
40% les plus pauvres 13 9 21 11 23
Classe moyenne (D5-D9) 64 62 59 63 55
10% les plus riches 23 29 20 26 21
Ratio de Palma 1.8 3.2 1.0 2.4 0.9
Source : Calculs des auteurs à partir des données EMOP
4.2. Indices de bien-être des ménages et pauvreté
L’indice de pauvreté P0, appelé incidence de la pauvreté ou taux de pauvreté, donne le
pourcentage de personnes pauvres dans la population. L’indice P1 ou profondeur de la pauvreté
donne l’écart moyen entre le revenu des personnes pauvres et le seuil de pauvreté exprimé en
pourcentage du seuil de pauvreté.
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Les personnes pauvres représentent un peu moins de la moitié de la population soit 47,8%. Le
taux de pauvreté varie selon le milieu, la région, le sexe et le niveau d’éducation. L’incidence
de la pauvreté est plus grande en milieu rural (27.3%) ou plus d’une (1) personne sur quatre (4)
souffre de la pauvreté. Les urbains sont moins souvent victimes de la pauvreté (13.9%) et cela
est encore plus vrai dans le district de Bamako où moins de 2 personnes sur 100 sont pauvres.
Dans les autres milieux urbains, le taux de pauvreté est particulièrement élevé, soit 59.7%
équivalent à près de 6 personnes sur dix.
La région la plus pauvre est celle de Sikasso (73.8%), suivie de Koulikoro (69.9%), Ségou
(59.3%), Gao (51.8%) et Mopti (51,0%) et avec des taux de pauvreté dépassant celui
d’ensemble. Les régions de Kidal, Tombouctou et Kayes et le district de Bamako sont les moins
pauvres avec des incidences de pauvreté inférieures à celle de l’ensemble du pays. L’écart
moyen au seuil de pauvreté est de 23% dans l’ensemble et a globalement les mêmes tendances
que le taux de pauvreté. Autrement dit, il faut donner en moyenne aux pauvres 23% du seuil de
pauvreté pour les sortir de la pauvreté.
Tableau 9. Indices de pauvreté de 2018 selon le milieu et la région administrative (en %)
Incidence Profondeur Sévérité
Milieu
Urbain 13.9 5.6 3.1
Bamako 1.2 0.3 0.1
Autre urbain 59.7 29.1 18.7
Rural 27.3 11.1 6.3
Région
Kayes 26.8 6.0 2.1
Koulikoro 69.9 31.8 18.6
Sikasso 73.8 45.6 33.5
Ségou 59.3 32.8 22.4
Mopti 51.0 18.9 9.8
Tombouctou 16.0 4.4 1.6
Gao 51.8 16.0 7.1
Kidal 0.5 0.0 0.0
Bamako 1.2 0.3 0.1
Total 47.8 23.0 14.7
Source : Calculs des auteurs à partir des données EMOP 2019
Dans l’ensemble, l’incidence de la pauvreté est plus grande parmi les hommes (49.8%) que
parmi les femmes (30.6%). Quand près de la moitié des hommes sont victimes de la pauvreté,
ce sont un peu plus de 3 femmes sur dix qui en souffrent. Le taux de pauvreté baisse clairement
avec le niveau d’éducation. L’incidence de la pauvreté varie de 53.3% parmi les personnes sans
aucune forme d’instruction formelle à 10.5% parmi les personnes de niveau secondaire ou plus,
en passant par 48.9% au "fondamental 1" et 25.7% au "fondamental 2".
Les catégories de personnes les plus souvent pauvres sont aussi celles qui ont en moyenne les
plus grands écarts au seuil de pauvreté (P1). Les hommes pauvres sont en moyenne près de
deux (2) fois plus (24.2%) distants de la ligne de pauvreté que les femmes pauvres (12.8%). De
même, les moins instruits sont non seulement plus souvent pauvres mais aussi leurs pauvres ont
en moyenne de plus grands écarts au seuil de pauvreté, comparativement aux plus instruits.
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Tableau 10. Indices de pauvreté 2019 selon le sexe et le niveau d’éducation du chef de ménage (en %)
Incidence Profondeur Sévérité
Sexe
Homme 49.8 24.2 15.5
Femme 30.6 12.8 7.4
Éducation
Aucun 53.3 25.6 16.3
Fondamental 1 48.9 25.6 17.3
Fondamental 2 25.7 10.4 5.7
Secondaire + 10.5 3.1 1.3
Total 47.8 23.0 14.7
Source : Calculs des auteurs à partir des données EMOP 2019
Sur la période 2015-2019, l’incidence de la pauvreté s’est élevée à 47.3% en 2015 ; à 47.8% en
2019 en passant par 50.5% en 2016 ; 44.9% en 2017 et 43.8% en 2018. La profondeur de la
pauvreté a suivi à peu près la même tendance.
Graphique 1. Évolution des indices de pauvreté P0, P1 et P2 (en %)
Source : Calculs des auteurs à partir des données EMOP
4.3. Indices d'inégalité de revenu
Parmi les indices d’inégalité présentés dans la méthodologie, l’indice de Gini a été privilégié
pour illustrer la situation de l’inégalité de revenu au Mali. Ce choix s’explique, d’une part, par
la possibilité offerte par ce choix de comparer les résultats de la présente étude à ceux d’autres
études, sur le Mali comme sur d’autres pays et, d’autre part, la facilité d’interprétation de la
valeur de l’indice de Gini. En effet, l’indice de Gini est l’indice d’inégalité le plus usuel et sa
valeur s’interprète plus facilement.
En 2019, le niveau global d’inégalité, dans la distribution du revenu, mesuré par l’indice de
Gini est de 44.9%. Ce niveau d’ensemble est inégalement réparti entre les milieux, les sexes et
les niveaux d’éducation des chefs de ménage. La distribution du revenu total, dans la
population, est plus inégalitaire en milieu urbain (44.3%) et particulièrement dans les milieux
0
10
20
30
40
50
60
2015 2016 2017 2018 2019
47,3
50,5
44,9 43,8
47,8
13,6 14,4 13,4 13,9
23
5,4 5,5 5,4 6,0
14,7
P0 P1 P2
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urbains hors de Bamako (45.0%), entre les personnes dont le chef de ménage est un homme
(45.9%) et entre les personnes dont le chef de ménage est sans instruction (42.8%) ou de niveau
secondaire (42.5%). Au contraire, l’inégalité de revenu est plus faible en milieu rural (40.8%)
et parmi les personnes appartenant à un ménage dirigé par une personne de niveau secondaire
(39.7%) ou supérieur (40.7%).
Graphique 2. Indice de Gini selon le milieu, le sexe et l’éducation du chef de ménage
Source : Calculs des auteurs à partir des données EMOP 2019
Dans les régions administratives, le revenu total est plus inégalement réparti à Kayes (46.5%),
suivie respectivement des régions de Kidal (46.1%), Koulikoro (43.8%) et Mopti (43.8%). La
région de Ségou (33.4%) a la distribution la moins inégalitaire, devant Tombouctou (34.6%) et
Sikasso (38.4%). Les régions de Kayes (46.5%) et Kidal (46.1%) sont les seules régions ayant
un niveau d’inégalité de revenu dépassant celui d’ensemble dans le pays.
Graphique 3. Indice de Gini selon la région
Source : Calculs des auteurs à partir des données EMOP 2019
36,0%
37,0%
38,0%
39,0%
40,0%
41,0%
42,0%
43,0%
44,0%
45,0%
46,0%
44,3%
41,1%
45,0%
40,8%
45,9%
43,5%
42,8%
42,5%
39,7%
40,7%
44,9%
0,0%
5,0%
10,0%
15,0%
20,0%
25,0%
30,0%
35,0%
40,0%
45,0%
50,0% 46,5%
43,8%
38,4%
33,4%
43,8%
34,6%
40,2%
46,1%
41,1%
44,9%
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Au regard des valeurs de l’indice de Gini, le niveau d’inégalité de revenu a augmenté entre
2015 (53.4%) et 2016 (56.7%). En revanche, il a baissé entre 2016 et 2017 (41.8%), augmenté
de nouveau entre 2017 et 2018 (51.3%) puis baissé entre 2018 et 2019 (44.5%). L’inégalité
évolue en "dents de scie" en alternant des hausses et des baisses.
Graphique 4. Évolution de l’indice de Gini
Source : Calculs des auteurs à partir des données EMOP 2019
4.4. Décomposition des indices de pauvreté et d'inégalité de revenu
La pauvreté (sur la base des dépenses), frappe 47.8% de la population. Ce taux augmente dans
les villes secondaires (59.7%) et diminue en milieu rural (27.3%). En tenant compte des poids
démographiques des deux (2) milieux, la contribution relative du milieu urbain autre que
Bamako à la pauvreté est de 92% alors que celle du milieu rural se chiffre à 7.2%.
Tableau 11. Décomposition par milieu de l’incidence de la pauvreté
Incidence de la
pauvreté
Part de population
Contribution
absolue
Contribution
relative
Bamako 0.012 0.133 0.002 0.003
Autre urbain 0.597 0.740 0.442 0.924
Rural 0.273 0.127 0.035 0.072
Total 0.478 1.000 0.478 1.000
Source : Calculs des auteurs à partir des données EMOP 2018
En tenant compte des incidences de pauvreté intérieures et des parts de population, les régions
administratives contribuent différemment au niveau de pauvreté nationale. La plus grande
contribution à la pauvreté vient de la région de Sikasso avec plus du quart de la pauvreté
d’ensemble. Elle est suivie de la région de Koulikoro qui pèse pour 23,6% de la pauvreté dans
le pays. Les régions de Ségou et de Mopti viennent ensuite avec respectivement 20,4% et 14,8%
de parts de la pauvreté.
La région de Kidal a la plus faible contribution, résultat de la combinaison d’une faible
incidence de pauvreté à l’intérieur et d’une faible part de la population. La deuxième plus faible
contribution vient du district de Bamako du fait de son faible taux de pauvreté intérieur et de sa
part considérable dans la population totale. La région de Tombouctou, la troisième plus faible
contribution à la pauvreté se trouve dans une situation différente de celle de Bamako c’est-à-
dire un taux de pauvreté intérieur faible et une part de population faible. La région de Kayes
0,0%
10,0%
20,0%
30,0%
40,0%
50,0%
60,0%
2015 2016 2017 2018 2019
53,4%
56,7%
41,8%
51,3%
44,5%
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Odhd
contribue à la pauvreté pour 7.5%, résultat d’un faible taux de pauvreté intérieur et d’une part
de population considérable à l’instar du district de Bamako.
Tableau 12. Décomposition par région de l’incidence de la pauvreté
Incidence de
la pauvreté
Part de
population
Contribution
absolue
Contribution
relative
Kayes 0.268 0.134 0.036 0.075
Koulikoro 0.699 0.161 0.113 0.236
Sikasso 0.738 0.180 0.133 0.278
Ségou 0.593 0.165 0.098 0.204
Mopti 0.510 0.139 0.071 0.148
Tombouctou 0.160 0.046 0.007 0.015
Gao 0.518 0.037 0.019 0.040
Kidal 0.005 0.005 0.000 0.000
Bamako 0.012 0.133 0.002 0.003
Total 0.478 1.000 0.478 1.000
Source : Calculs des auteurs à partir des données EMOP 2018
Toute la pauvreté du pays est presque entièrement due aux ménages dirigés par un homme
(93.3%) à cause, d’une part, de leur poids démographique écrasant et, d’autre part, du niveau
déjà plus élevé du taux de pauvreté pour cette catégorie de population, comparée aux personnes
dont les chefs de ménage sont des femmes. Ces dernières ne contribuent que pour 6.7% à la
pauvreté nationale.
Tableau 13. Décomposition par sexe de l’incidence de la pauvreté
Incidence de la
pauvreté
Part de population
Contribution
absolue
Contribution relative
Homme 0.498 0.896 0.446 0.933
Femme 0.306 0.104 0.032 0.067
Total 0.478 1.000 0.478 1.000
Source : Calculs des auteurs à partir des données EMOP 2018
L’analyse par niveau d’éducation du chef de ménage montre que les personnes dont le chef de
ménage est sans instruction comptent pour 78.5% de la pauvreté nationale. Les personnes dont
le chef de ménage a le niveau "fondamental 1" comptent pour 16%, les personnes dont le chef
de ménage a le niveau "fondamental 2", pour 4.2% et celles dont le chef est de niveau secondaire
et plus pour 1.4% de la pauvreté d’ensemble. Le niveau "aucun" et "fondamental 1" pèsent plus
dans la pauvreté que dans la population, contrairement aux niveaux "fondamental 2" et
"secondaire et plus" qui pèsent moins dans la pauvreté que dans la population.
Tableau 14. Décomposition par niveau d’éducation de l’incidence de la pauvreté
Incidence de la
pauvreté
Part de population
Contribution
absolue
Contribution
relative
Aucun 0.533 0.704 0.375 0.785
Fondamental 1 0.489 0.156 0.076 0.160
Fondamental 2 0.257 0.078 0.020 0.042
Secondaire + 0.105 0.062 0.007 0.014
Total 0.478 1.000 0.478 1.000
Source : Calculs des auteurs à partir des données EMOP 2018
La décomposition de l’inégalité à l’aide de l’indice de Gini génère un résidu qui ne peut être
attribué à aucun sous-groupe de population. Pour cette raison, nous choisissons de présenter
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aussi la décomposition de l’indice d’entropie généralisée GE(0) qui donne ici la même valeur
d’ensemble (48.7%) que l’indice de Gini.
Compte tenu du poids démographique et du niveau d’inégalité interne de chaque milieu, le
milieu urbain compte en son sein 24% de l’inégalité totale alors que le milieu rural en compte
63.7% pour une composante intra-milieu totale pesant pour 87.7% de l’inégalité de revenu dans
le pays. Les disparités entre les 2 milieux constituent seulement environ 11.8% de l’inégalité
de revenu totale.
Tableau 15. Décomposition par milieu de l’indice d’entropie généralisée GE(0)
Indice GE(0)
Part de
population
Contribution
absolue
Contribution
relative
Urbain 0.329924 0.258592 0.085316 0.239828
Rural 0.305606 0.741408 0.226638 0.637094
Composante intra-milieu 0.311954 0.876922|
Composante inter-milieu 0.041824 0.117569
Population 0.355737 1.000000 0.355737 1.000000
Source : Calculs des auteurs à partir des données EMOP 2019
L’inégalité de revenu provient à 88.2% des disparités entre les personnes dont le chef de ménage
est un homme et à 11.3% des différences de revenu entre personnes venant d’un ménage dirigé
par une femme. Ces deux (2) contributions constituant la composante intra-sexe de l’inégalité
totale, la composante inter-sexe de cette inégalité est quasi-nulle.
Tableau 16. Décomposition par sexe de l’indice d’entropie généralisée GE(0)
Indice GE(0)
Part de
population
Contribution
absolue
Contribution
relative
Homme 0.349228 0.899423 0.314104 0.882966
Femme 0.399890 0.100577 0.040220 0.113060
Composante intra-sexe 0.354323 0.996026
Composante inter-sexe 0.000767 0.002155
Population 0.355737 1.000000 0.355737 1.000000
Source : Calculs des auteurs à partir des données EMOP 2019
Les contributions à l’inégalité totale des sous-groupes de population suivant le niveau
d’éducation de leur chef de ménage sont globalement comparables à leurs poids dans la
population. Il faut cependant noter que les personnes dont les chefs de ménages sont sans
instruction ou ont le niveau "secondaire ou plus" pèsent légèrement plus dans la pauvreté que
dans la population. La composante intra-niveau d’éducation du chef de ménage est de 90%,
réduisant la composante inter-niveau à seulement 10% de l’inégalité de revenu d’ensemble.
Tableau 17. Décomposition par niveau d’éducation de l’indice d’entropie généralisée GE(0)
Indice GE(0)
Part de
population
Contribution
absolue
Contribution
relative
Aucun 0.311594 0.704497 0.219517 0.617076
Fondamental 1 0.324070 0.158225 0.051276 0.144140
Fondamental 2 0.382668 0.074700 0.028585 0.080356
Secondaire + 0.337717 0.062577 0.021133 0.059407
Composante intra-niveau 0.320512 0.900979
Composante inter-niveau 0.034433 0.096794
Population 0.355737 1.000000 0.355737 1.000000
Source : Calculs des auteurs à partir des données EMOP 2019
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Odhd
La décomposition de l’inégalité à l’aide de l’indice de Gini génère un résidu qui ne peut être
attribué à aucun sous-groupe de population. Seule la partie non résiduelle est répartie entre les
différents sous-groupes de population et en une partie intergroupe et une partie intra-groupe.
La décomposition de l’inégalité totale entre les deux (2) milieux de résidence génère un résidu
de 18.2%, indiquant que seuls les 82% restants sont attribuables à l’un ou à l’autre milieu ou à
l’écart entre les deux (2) milieux. Compte tenu du poids démographique et du niveau d’inégalité
interne de chaque milieu, la plus grande contribution à l’inégalité vient des disparités à
l’intérieur des deux (2) milieux ; soit 50.8% répartis entre l’intérieur du milieu urbain (10.4%)
et l’intérieur du milieu rural (40.4%). La disparité entre les deux (2) groupes de population
explique 31% de l’inégalité totale.
Tableau 18. Décomposition par milieu de l’indice de Gini
Indice
Gini
Part de
population
Part du revenu
total
Contribution
absolue
Contribution
relative
Urbain 0.4437 0.2617 0.3995 0.0464 0.1043
Rural 0.4052 0.7383 0.6005 0.1797 0.4041
Part intra 0.2260 0.5084
Part inter 0.1378 0.3099
Résidu 0.0808 0.1817
Total 0.4446 1.0000 1.0000 0.4446 1.0000
Source : Calculs des auteurs à partir des données EMOP 2019
Dans la décomposition de l’inégalité par sexe du chef de ménage, le résidu non attribuable vaut
17.9%. Les 82% restants se répartissent entre la part due aux disparités entre personnes ayant
le même sexe de chef de ménage (79.2%) et la part due à l’écart entre les 2 sexes de chef de
ménage (2.8%). L’inégalité totale intra-groupe (79.2%) provient en grande partie des disparités
entre personnes ayant un homme comme chef de ménage (77.9%) et dans une moindre mesure
des différences de revenu entre personnes ayant une femme comme chef de ménage (1.3).
Tableau 19. Décomposition par sexe de l’indice de Gini
Incidence de la
pauvreté
Part de
population
Part revenu
Contribution
absolue
Contribution
relative
Homme 0.4386 0.8951 0.8827 0.3465 0.7794
Femme 0.4849 0.1049 0.1173 0.0060 0.0134
Part intra 0.3525 0.7928
Part inter 0.0124 0.0279
Résidu 0.0797 0.1793
Total 0.4446 1.0000 1.0000 0.4446 1.0000
Source : Calculs des auteurs à partir des données EMOP 2019
Dans la décomposition par niveau d’éducation du chef de ménage, le résidu est de 32.5%,
équivalant à une part explicable de 67.5% répartie entre l’effet intra-niveau (44.8%) et l’effet
inter-niveau d’éducation du chef de ménage (22.6%). Dans les 44.8% d’effet intra-niveau, le
niveau "aucun" représente 41,2%, le niveau "fondamental 1" représente 2.1% ; le niveau
"fondamental 2" représente 0.7% et le niveau "secondaire ou plus" représente 0.9%.
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Odhd
Tableau 20. Décomposition par niveau d’éducation de l’indice de Gini
Incidence de la
pauvreté
Part de
population
Part du revenu
total
Contribution
absolue
Contribution
relative
Aucun 0.4171 0.7029 0.6242 0.1830 0.4117
Fondamental 1 0.4093 0.1572 0.1429 0.0092 0.0207
Fondamental 2 0.4494 0.0773 0.0914 0.0032 0.0071
Secondaire+ 0.4311 0.0626 0.1415 0.0038 0.0086
Part intra 0.1992 0.4481
Part inter 0.1005 0.2261
Résidu 0.1449 0.3259
Total 0.4446 1.0000 1.0000 0.4446 1.0000
Source : Calculs des auteurs à partir des données EMOP 2019
Le résidu de la décomposition de l’indice de Gini par région est de 46%, la part intra-région de
12.7% et la part inter-région de 40.4%. Autrement dit, en éliminant les disparités de revenu à
l’intérieur des régions, l’inégalité totale ne serait réduite que de 12.7% alors qu’en éliminant
les disparités de revenus entre les régions, on réduirait l’inégalité totale de 40.4%. Les inégalités
interrégionales en matière de revenu comptent pour beaucoup dans l’inégalité totale de revenu
dans le pays. Les plus grandes contributions à l’inégalité intra-région viennent du district de
Bamako (3.2%) et des régions de Sikasso (2.7%) et de Kayes (1.8%).
Tableau 21. Décomposition par région de l’indice de Gini
Incidence de la
pauvreté
Part de
population
Part du revenu
total
Contribution
absolue
Contribution
relative
Kayes 0.4452 0.1347 0.1312 0.0079 0.0177
Koulikoro 0.4393 0.1622 0.0896 0.0064 0.0144
Sikasso 0.3847 0.1809 0.1704 0.0119 0.0267
Ségou 0.3157 0.1597 0.1336 0.0067 0.0151
Mopti 0.4393 0.1397 0.1396 0.0086 0.0193
Tombouctou 0.3095 0.0466 0.0402 0.0006 0.0013
Gao 0.4238 0.0373 0.0376 0.0006 0.0013
Kidal 0.4388 0.0050 0.0135 0.0000 0.0001
Bamako 0.4279 0.1339 0.2442 0.0140 0.0315
Part intra 0.1794 0.1274
Part inter 0.1794 0.4036
Résidu 0.2086 0.4691
Total 0.4446 1.0000 1.0000 0.4446 1.0000
Source : Calculs des auteurs à partir des données EMOP 2019
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Odhd
5. Redistribution du revenu et effet sur la pauvreté et l’inégalité
La distribution du revenu générée par le fonctionnement plus ou moins libre du marché est
souvent jugée insatisfaisante et devrait pour cela faire l’objet de quelques correctifs de la part
des pouvoirs publics à l’aide de divers instruments servant à la redistribution. Cette
redistribution consiste globalement à faire des prélèvements obligatoires principalement auprès
des plus aisés pour financer la production et la distribution de biens et services publics ainsi
que la mise en œuvre de transferts multiformes principalement en faveur des plus démunis.
L’hypothèse sous-jacente est que les prélèvements obligatoires et les transferts combinés avec
le renforcement des "capabilités" des plus vulnérables à créer par eux-mêmes des revenus
devraient générer une distribution de revenus moins inégalitaire que celle issue du marché.
Le besoin de mesure des effets du système de redistribution sur la pauvreté et les inégalités
s’explique par le fait que les prélèvements obligatoires, les biens et services publics offerts et
les transferts mis en place peuvent ne pas tomber principalement ou pas du tout sur les cibles
initiales. Par exemple, les taxes sur la consommation constituent une partie importante des
recettes "or plus le niveau de vie augmente, plus la part de la consommation diminue dans le
revenu au profit de l'épargne" ce qui fait que l'impôt sur la consommation rapporté au revenu
"représente une part proportionnellement plus faible pour les plus aisés".
Le système fiscal du Mali qui est déclaratif est peu connu du citoyen mais en règle générale
l’impôt est très élevé, ce qui réduit la marge bénéficiaire pour l’investissement. Bien que des
évolutions positives sont à noter telles que l’instauration de l’impôt synthétique,
l’informatisation des acteurs ainsi que la déconcentration des guichets, il est perfectible sur bien
d’aspects :
✓ le faible niveau de recouvrement des impôts et taxes ;
✓ la problématique du suivi et du contrôle ;
✓ la faiblesse du taux de pression fiscale ;
✓ la faible redevabilité ;
✓ la faible compréhension des barèmes.
5.1. Méthodes d'estimation des effets redistributifs
La principale problématique dans l’estimation des effets sur la pauvreté et l’inégalité de revenu
du système de redistribution est de concilier les données macroéconomiques des Comptes
nationaux ou du Tableau des opérations financières de l’Etat (TOFE) notamment les recettes
fiscales avec les données d’enquêtes sur les ménages (EMOP). Il s’agit de chercher à attribuer
de façon plus ou moins rationnelle, les différentes catégories de recettes fiscales aux catégories
de ménages qui en sont normalement les contribuables. L’exercice est plus facile avec les
transferts et certaines charges sociales qui apparaissent dans les bases de données EMOP.
L’aspect "fourniture de biens et services publics" de la redistribution n’est pas pris en compte
dans nos analyses des effets de la redistribution. Ces analyses se limitent à la fiscalité, aux
charges sociales et aux transferts reçus par les ménages et sur lesquels des données sont
collectées par les enquêtes EMOP.
Notre analyse de l’effet de la redistribution sur la pauvreté se fait exclusivement à l’aide des
taxes indirectes payées sur les dépenses. Pour cela, on se sert de la base dépenses de l’EMOP
qui contient aussi la liste des biens et services payés par chaque ménage durant la période de
référence. A partir de cette liste, il faut regrouper ces biens et services en autant de catégories
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Odhd
pertinentes du point de vue fiscal (taxe indirecte, droit d'accise, droit de porte, etc.). Les comptes
économiques fournissent le total des recettes fiscales indirectes par catégorie de biens et
services (alimentation, boissons alcoolisées, tabac, produits secs, habitat, produits pétroliers,
transport, santé, éducation, loisir, etc.). L’exercice consiste à répartir ce total de recette entre
les ménages en fonction de leurs dépenses totales et en fonction des catégories de biens et
services qu’ils ont achetés. Les montants de taxes indirectes ainsi estimés pour chaque ménage
sont ajoutés aux montants de dépenses contenus dans la base EMOP pour former ce que nous
considérons par hypothèse comme les dépenses totales des ménages s’ils n’avaient pas eu à
payer les taxes indirectes sur leurs achats de biens et services. Ce sont les dépenses ou encore
les montants d’achats de biens et services en l’absence de taxes indirectes. La série initiale de
dépenses dans EMOP, avant l’ajout des parts de recettes indirectes, est considérée comme les
dépenses totales en présence de taxes indirectes. L’effet de la redistribution par les taxes
indirectes sur la pauvreté est obtenu en faisant l’analyse de la pauvreté sur les deux (2) variables
séparément et en faisant la différence entre les valeurs d’indice de pauvreté obtenues.
L’estimation de l’effet de la redistribution sur les inégalités est faite suivant une procédure
similaire mais cette fois-ci en se servant de la base emploi de l'EMOP et en prenant en compte
les prélèvements obligatoires et les transferts reçus par les ménages. Cette base contient les
revenus des ménages, les charges sociales payées et les transferts publics et privés reçus. On
considère les montants de recettes fiscales indirectes et les montants de recettes fiscales directes
tirées des impôts directs, dans les comptes nationaux ou dans le TOFE. Ces montants sont
répartis entre les ménages selon les catégories de biens et de services achetés, selon que le
ménage soit redevable ou non du type d’impôt direct. Les montants d’impôts/taxes estimés pour
chaque ménage ainsi que les charges sociales sont ajoutés au revenu hors transferts dans la base
emploi pour former le revenu avant prélèvements obligatoires et transferts, autrement dit avant
toute redistribution. La série initiale de revenu augmentée des transferts dans la base emploi de
l'EMOP est considérée comme le revenu après prélèvements obligatoires et transferts,
autrement dit le revenu après application de tous les instruments de redistribution. L’effet de la
redistribution sur l’inégalité de revenu est obtenu en calculant l’indice d’inégalité sur les deux
(2) distributions de revenus, avant et après redistribution, et en faisant la différence entre les
deux (2) valeurs obtenues.
5.2. Redistribution par les transferts publics et privés
La redistribution par les transferts consiste à augmenter les revenus tirés des facteurs de
production (travail et capital) de diverses formes de gains monétaires, à travers le système de
protection sociale, des filets sociaux, des bourses d’études, en fonction de caractéristiques
sociodémographiques préalablement définies. Dans notre analyse, ces transferts incluent, en
plus des transferts publics octroyés par l’État, les transferts reçus d’autres ménages au titre de
la solidarité traditionnelle, parentale ou religieuse. Dans ce cas, le champ de la redistribution
par les transferts couvrirait tous les revenus gagnés sans contrepartie en travail ou en capital.
Les transferts publics comme ceux privés ont pour objectif d’aider à améliorer la situation des
plus pauvres et des plus vulnérables à l’issue de la distribution primaire du revenu issue du libre
jeu économique.
En 2019, l’ensemble des transferts reçus par les ménages au Mali se chiffrent à 291 milliards
de FCFA. Ce montant se répartit de façon inégalitaire entre les différentes catégories de
ménages. Les ménages urbains en reçoivent 145 milliards FCFA contre 146 milliards pour les
ruraux ; les ménages dirigés par un homme en reçoivent 240 milliards contre 51 milliards pour
ceux dirigés par une femme et les ménages dont le chef est sans niveau d’instruction (164
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Odhd
milliards) en reçoivent le plus, suivis des ménages dont le chef a le niveau "secondaire et plus"
(66 milliards) et des ménages dont le chef a le niveau "fondamental" (70 milliards pour les 2
cycles). Parmi les régions administratives, le district de Bamako reçoit le montant de transferts
le plus important (90 milliards), suivi de Sikasso (60 milliards), Kayes (53 milliards), Mopti
(27 milliards) et Ségou (22 milliards). Les régions de Kidal (4 milliards), Koulikoro (9
milliards), Tombouctou (13 milliards) et Gao (13 milliards) reçoivent les plus faibles montants.
Cependant, en tenant compte du poids démographique, ces classements changent quelque peu.
Dans ce cas, le milieu urbain (27 500 FCFA par personne) reçoit par tête, beaucoup plus de
transferts que le milieu rural (21 455 FCFA par personne) et les ménages dirigés par une
personne de niveau "secondaire et plus" (52 441 FCFA) en reçoivent beaucoup plus que les
ménages dont le chef a tout au plus le niveau "fondamental 2".
Tableau 22. Transferts reçus par les ménages (en milliards FCFA)
Revenu sans
transfert
Transfert total
Revenu avec
transfert
Transferts per
capita (FCFA)
Région
Kayes 586 53 638 19 355
Koulikoro 435 9 443 2 701
Sikasso 750 60 810 16 584
Ségou 593 22 615 6 637
Mopti 621 27 648 9 473
Tombouctou 204 13 217 14 302
Gao 172 13 185 17 126
Kidal 93 4 96 37 188
Bamako 1 319 90 1 409 33 270
Milieu
Urbain 2 089 145 2 234 27 501
Bamako 1 319 90 1 409 33 270
Autre urbain 2 682 146 2 828 9 694
Rural 770 55 825 21 455
Sexe
Homme 4 180 240 4 419 13 201
Femme 592 51 642 23 981
Éducation
Aucun 2 854 164 3 017 11 464
Fondamental 1 691 33 725 10 526
Fondamental 2 477 27 504 17 356
Secondaire + 749 66 815 52 441
Total 4 771 291 5 062 14 250
Source : Calculs des auteurs à partir des données EMOP 2019
En rapportant les montants de transferts reçus aux revenus avant transferts, on estime un taux
effectif de transfert qui montre quelques disparités qui méritent d’être analysées. Le taux
effectif global de transfert est de 6.1%. Autrement dit les ménages reçoivent sous forme de
transferts, l’équivalent de 6.1% de leur revenu avant transfert. Ce taux est plus élevé pour les
ménages urbains qui reçoivent l’équivalent de 6.9% de leur revenu sous forme de transferts et
pour les ménages dirigés par une femme qui reçoivent l’équivalent de 8.6% de leur revenu. Il
est plus élevé pour les ménages ruraux qui ne reçoivent que 6.5% de leur revenu sous forme de
transferts et pour les ménages dirigés par une femme qui reçoivent 7.2% de leur revenu sous
forme de transferts. Ce taux est le plus élevé pour les ménages dirigés par une personne de
niveau "secondaire ou plus" (8.8%) et le plus faible pour les ménages dirigés par une personne
de niveau "fondamental 1" (4.8%). On pourrait relever un certain paradoxe dans ces résultats
du moment où les transferts sont théoriquement destinés aux plus pauvres alors que les urbains
et les plus instruits sont plus susceptibles d’avoir les revenus les plus élevés.
Dans les régions administratives, les taux de transferts effectifs connaissent une grande
variabilité entre sa valeur minimale (2%) observée à Koulikoro et sa valeur maximale (9%)
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38 38 |
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33
Odhd
observée à Kayes. Les autres régions ayant des taux effectifs de transferts élevés sont : Sikasso,
Tombouctou, Gao et le district de Bamako. A l’inverse, Ségou, Mopti et Kidal sont les autres
régions avec les plus faibles (inférieur au niveau d’ensemble) taux effectifs de transferts.
Graphique 5. Taux effectifs de transferts par région, milieu, sexe et niveau d’éducation (en %)
Source : Calculs des auteurs à partir des données EMOP 2019
5.3. Redistribution par la fiscalité
La redistribution par la fiscalité consiste à faire des prélèvements obligatoires sur les revenus
bruts des ménages en vue de financer des biens et services publics. Dans nos analyses ces
prélèvements comprennent des taxes indirectes sur la consommation, des impôts directs sur les
revenus et des charges sociales au titre du système de protection sociale.
Les impôts, taxes et charges sociales payés par les ménages s’élèvent à 1100 milliards de FCFA
dont 651 milliards en milieu urbain. La répartition entre ménages dirigés par un homme et
ménages dirigés par une femme est respectivement de 922 milliards contre 178 milliards.
A travers les régions administratives, le district de Bamako paye le montant d’impôts, taxes et
charges sociales le plus élevé soit 441 milliards de FCFA. Il est suivi des régions de Sikasso,
Kayes, Mopti, Koulikoro et Ségou. La région de Gao paie le plus faible montant juste derrière
Kidal et Tombouctou.
Les ménages dont le chef est sans instruction formelle supportent plus de la moitié des
prélèvements obligatoires, soit 544 milliards de FCFA probablement en raison de leur poids
démographique écrasant. Les ménages dirigés par une personne de niveau secondaire ou plus
viennent en deuxième position avec 255 milliards de FCFA d’impôts, taxes et charges sociales
payés. Le montant payé diminue avec le niveau d’instruction entre le niveau "aucun" et le
niveau "fondamental 2".
0,0 1,0 2,0 3,0 4,0 5,0 6,0 7,0 8,0 9,0
Kayes
Koulikoro
Sikasso
Ségou
Mopti
Tombouctou
Gao
Kidal
Bamako
Urbain
Bamako
Autre urbain
Rural
Homme
Femme
Aucun
Fondamental 1
Fondamental 2
Secondaire +
Ensemble
9,0
2,0
8,1
3,7
4,3
6,6
7,5
4,0
6,8
6,9
6,8
5,4
7,2
5,7
8,6
5,7
4,8
5,7
8,8
6,1
![]() |
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34
Odhd
Tableau 23. Impôts, taxes et charges sociales (en milliards FCFA)
Revenu avant
redistribution
Prélèvement
Revenu après
prélèvement
Prélèvement
par tête
(FCFA)
Région Kayes 586 119 467 43 647
Koulikoro 435 88 346 26 982
Sikasso 750 135 615 37 064
Ségou 593 86 507 25 663
Mopti 621 95 526 33 626
Tombouctou 204 58 146 61 558
Gao 172 36 136 47 276
Kidal 93 43 50 427 782
Bamako 1 319 441 878 163 418
Milieu Urbain 2 089 651 1 438 123 457
Bamako 1 319 441 878 163 418
Autre urbain 2 682 449 2 234 29 878
Rural 770 210 560 81 575
Sexe Homme 4 180 922 3 257 50 752
Femme 592 178 414 83 950
Éducation Aucun 2 854 544 2 309 38 105
Fondamental 1 691 159 533 50 070
Fondamental 2 477 142 335 90 229
Secondaire + 749 255 494 201 864
Total 4 771 1 100 3 671 54 214
Source : Calculs des auteurs à partir des données EMOP 2018
Le taux effectif de prélèvements obligatoire, obtenu en rapportant le revenu brut aux montants
de taxes, impôts et charges sociales payés, qui est globalement de 23.1% montre quelques
disparités entre les différents types de prélèvements. Il varie de 0.5% pour les charges sociales
à 17.2% pour les taxes indirectes, en passant par 5.4% pour les impôts directs.
Graphique 6. Taux effectifs des prélèvements obligatoires (en %)
Source : Calculs des auteurs à partir des données EMOP 2019
0,0
5,0
10,0
15,0
20,0
25,0
Taux effectif
Taxe sur la
consommation
du ménage
Taux effectif
Impôts sur le
revenu
Taux effectif
Charges sociales
Taux effectif
Prélèvement
obligatoire total
17,2
5,4
0,5
23,1
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40 40 |
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Odhd
Le taux de prélèvements obligatoires est plus élevé en milieu urbain (31.2%) qu’en milieu rural
(27%), pour les ménages dirigés par une femme (30%) plus que pour les ménages dirigés par
un homme (22.1%). Ce taux augmente progressivement à mesure que le niveau d’éducation du
chef de ménage augmente, de 23% pour les "sans instruction" à 34% pour le niveau "secondaire
et plus", en passant par 19.1% pour le fondamental 1 et 29.8% pour le fondamental 2. Dans les
régions administratives, la région de Kidal a le taux le plus élevé suivi du district de Bamako et
de la région de Tombouctou.
Graphique 7. Taux effectifs des prélèvements obligatoires par région, milieu, sexe et éducation (en %)
Source : Calculs des auteurs à partir des données EMOP 2018
5.4. Effets de la redistribution sur la pauvreté
L’analyse de l’effet de la redistribution sur la pauvreté se limite à celle de l’effet des taxes car
la pauvreté est estimée à l’aide des dépenses des ménages et non à l’aide des revenus. On
procède par une analyse de la pauvreté sans et avec les taxes sur les dépenses. Les variations
des indices de pauvreté (P0 et P1) sont ici analysées sur les différentes catégories
sociodémographiques. Globalement, la prise en compte des taxes a eu comme effet
d’augmenter les indices de pauvreté, aussi bien l’incidence que la profondeur. Ce résultat
montre la pertinence des mesures d’exonération de certains produits de grande consommation
pour protéger les plus vulnérables. Les taxes auraient donc eu pour effet d’augmenter la
pauvreté mais cette analyse est partielle car elle ne tient pas compte du bénéfice des biens et
services à l’intention des pauvres et qui sont financés, entre autres, par les recettes tirées de ces
taxes. En faisant une analyse plus complète intégrant tous les bénéfices offerts aux pauvres, il
y a de fortes chances que les indices de pauvreté diminuent.
L’augmentation de la proportion de pauvres suite à la prise en compte des taxes indirectes est
la plus forte dans les régions de Gao (8.7), Mopti (8.5%) et Kayes (7.7%) alors que les plus
faibles variations positives de l’incidence de la pauvreté sont observées à Kidal, dans le district
de Bamako et dans la région de Sikasso.
20,2
20,3
18,0
14,5
15,3
28,4
20,7
46,1
33,5
31,2
33,5
16,7
27,3
22,1
30,0
19,1
23,0
29,8
34,0
23,1
0,0 5,0 10,0 15,0 20,0 25,0 30,0 35,0 40,0 45,0 50,0
Kayes
Koulikoro
Sikasso
Ségou
Mopti
Tombouctou
Gao
Kidal
Bamako
Urbain
Bamako
Autre urbain
Rural
Homme
Femme
Aucun
Fondamental 1
Fondamental 2
Secondaire +
Total
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Tableau 24. Effet de la redistribution sur la pauvreté (en %)
Variation P0 Variation P1
Région
Kayes 7.7 3.1
Koulikoro 5.4 6.3
Sikasso 3.3 6.3
Ségou 5.3 4.9
Mopti 8.5 5.3
Tombouctou 4.5 1.7
Gao 8.7 7.1
Kidal 0.3 0.1
Bamako 2.1 0.4
Milieu
Urbain 4.2 2.0
Bamako 2.1 0.4
Autre urbain 5.8 5.4
Rural 6.3 3.7
Sexe
Homme 5.3 4.6
Femme 5.9 3.4
Éducation
Aucun 5.7 5.0
Fondamental 1 5.9 4.5
Fondamental 2 4.5 2.9
Secondaire + 1.3 1.3
Total 5.4 4.5
Source : Calculs des auteurs à partir des données EMOP 2019
Le milieu rural est plus touché que le milieu urbain en termes d’augmentation de la proportion
de pauvres (6.3 points de pourcentage contre 4.2 points de pourcentage) et en termes
d’augmentation de l’écart moyen des pauvres à la ligne de pauvreté. Les ménages dirigés par
des hommes sont moins touchés en termes d’augmentation de la proportion de pauvres (5.3
contre 5.9) mais plus touchés en termes d’augmentation de la profondeur de la pauvreté.
L’analyse par niveau d’éducation du chef de ménage montre que la proportion de pauvres a le
plus augmenté pour le "fondamental 1" (5.9 points de pourcentage), suivi par le niveau "aucun"
avec 5.7 points de pourcentage et le niveau "fondamental 2" (4.5 points de pourcentage).
L’augmentation de l’incidence de la pauvreté aura été la moins forte pour le niveau "secondaire
et plus". L’augmentation du déficit de pauvreté diminue progressivement avec le niveau
d’éducation du chef de ménage.
L’évolution de l’effet de la redistribution (taxes indirectes) sur la pauvreté montre une tendance
globale à la baisse. En effet, la variation de l’incidence de la pauvreté, du fait de la prise en
compte des taxes indirectes passe de 8.4 points de pourcentage en 2015, à 7.1 points en 2016,
8.5 points en 2017, 6.6 points en 2018 puis 5.4 points de pourcentage en 2019. Les taxes
aggraveraient la pauvreté mais cet effet négatif s’estompe au fil des années.
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42 42 |
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37
Odhd
Graphique 8. Évolution de l’effet des taxes sur la pauvreté (en %)
Source : Calculs des auteurs à partir des données EMOP (2015, 2016, 2017, 2018 et 2019)
5.5. Effets de la redistribution sur l’inégalité de revenu
L’effet de la redistribution sur l’inégalité de revenu est ici mesuré par l’écart entre les valeurs
du coefficient de Gini avant et après la redistribution par les taxes, les impôts et les charges
sociales. Cependant, selon FIPECO (2016), cette méthode a des limites à savoir :
✓ "les cotisations sociales de retraite et d'assurance chômage sont dégressives parce qu'elles
sont plafonnées, mais les prestations auxquelles elles donnent droit sont elles-mêmes
plafonnées". Ainsi, les effets de ces régimes "sur la distribution des revenus ne peuvent
être appréciés qu'en examinant simultanément les cotisations et les prestations" ;
✓ la mesure de la redistribution par les prélèvements obligatoires "ignore l'incidence réelle
des prélèvements obligatoires car elle suppose qu'ils sont entièrement supportés par ceux
qui en sont juridiquement redevables" ;
En 2019, la redistribution par les prélèvements obligatoires (taxes, impôts, charges sociales) et
les transferts au profit des ménages ont eu pour effet de réduire l’inégalité de revenu. Suite à
l’application de toutes ces mesures, le coefficient de Gini a baissé de 0.6 point de pourcentage,
passant de 44.5% à 43.8%. Cette diminution du niveau d’inégalité de revenu a été diversement
ressentie chez les catégories sociodémographiques.
La réduction de l’inégalité de revenu a été la plus forte en milieu rural (2.7 points de
pourcentage), comparativement au milieu urbain où la réduction n’a été que 2.3 points de
pourcentage. La baisse de l’inégalité a été la même pour les personnes dont le chef de ménage
est une femme (0.7 point) et pour celles dont le chef de ménage est un homme (0.7 point).
L’amplitude de la baisse a été moindre pour les ménages dont le chef a le niveau "fondamental
1".
0,0%
1,0%
2,0%
3,0%
4,0%
5,0%
6,0%
7,0%
8,0%
9,0%
2015 2016 2017 2018 2019
8,4%
7,1%
8,5%
6,6%
5,4%
![]() |
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38
Odhd
Graphique 9. Variations de l’indice de Gini par milieu, sexe et niveau d’éducation (en %)
Source : Calculs des auteurs à partir des données EMOP 2019
Dans les régions administratives, la redistribution s’est traduite par une hausse de la valeur du
coefficient de Gini partout sauf à Tombouctou. Autrement dit, l’inégalité a augmenté, suite à la
redistribution, dans toutes les régions administratives sauf à Tombouctou (-0.8 point de
pourcentage). Dans les autres régions on a assisté à une augmentation de l’inégalité. Cette
hausse est la plus forte à Koulikoro, suivi de Bamako, Kayes, Mopti et Kidal.
Graphique 10. Variation de l’indice de Gini dans les régions (en %)
Source : Calculs des auteurs à partir des données EMOP 2019
0,0%
0,5%
1,0%
1,5%
2,0%
2,5%
3,0%
2,3%
2,7%
0,7% 0,7%
1,9%
0,9%
2,1%
1,6%
0,6%
-1,0%
0,0%
1,0%
2,0%
3,0%
4,0%
5,0%
6,0%
3,8%
5,2%
0,0%
0,6%
2,8%
-0,8%
1,4%
2,3%
4,5%
0,6%
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44 44 |
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39
Odhd
L’effet de la redistribution sur l’inégalité n’a pas enregistré de tendance monotone au fil des
années. La variation du coefficient de Gini sur la période 2015-2019 a été à la hausse toutes les
années sauf 2017, année où l’indice a baissé suite à la redistribution. La variation de l’indice de
Gini est passée de 3.7 points de pourcentage en 2015 à 5.4 points en 2016, -1,2 point en 2017,
3.5 points en 2018.
Graphique 11. Évolution de l’effet de la redistribution sur l’inégalité (en %)
Source : Calculs des auteurs à partir des données EMOP (2014, 2016, 2018 et 2019)
-2,0%
-1,0%
0,0%
1,0%
2,0%
3,0%
4,0%
5,0%
6,0%
2015 2016 2017 2018 2019
3,7%
5,4%
-1,2%
3,5%
0,6%
![]() |
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40
Odhd
Conclusion
Dans le cadre de la présente étude, il ressort des analyses effectuées que le revenu comprend
trois (3) grandes sources à savoir le travail, le capital et les transferts reçus. Le revenu total
d’ensemble est estimé à 3 984 milliards de FCFA dont la plus grande part est tirée du travail
(91%).
La pauvreté a frappé en 2019 un peu moins de la moitié de la population (47.8%) mais cette
incidence est plus grande en milieu rural (27.3%) qu’en milieu urbain (13.9%). Les régions les
plus pauvres sont celles de Sikasso (73.8%), Koulikoro (69.9%), Ségou (59.3%) et Gao (51.8%)
et les moins pauvres sont Kidal, Bamako, Tombouctou et Kayes. Le taux de pauvreté baisse
nettement avec le niveau d’instruction. L’écart moyen au seuil de pauvreté est de 23% dans
l’ensemble et a globalement les mêmes tendances que le taux de pauvreté. Les contributions
relatives à la pauvreté sont de 7% pour le milieu urbain et 92% pour le milieu rural.
Le niveau global d’inégalité de revenu mesuré par l’indice de Gini est, en 2019, de 44.5%. La
distribution du revenu est plus inégalitaire en milieu urbain et parmi la population ayant un
homme comme chef de ménage. La composante intra-milieu de l’inégalité de revenu pèse
50.8% contre 31% de composante inter-milieu.
La redistribution par les taxes a eu pour effet d’augmenter les indices de pauvreté, aussi bien
l’incidence que la profondeur. Le milieu urbain est plus touché que le milieu rural en termes
d’augmentation de la proportion de pauvres mais moins touché en termes d’augmentation de
l’écart moyen des pauvres à la ligne de pauvreté.
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41
Odhd
Recommandations
Les résultats de l’analyse des données permettent de formuler les recommandations suivantes :
✓ poursuivre et renforcer les politiques actives de promotion de l’emploi des jeunes
diplômés tout en tenant compte du genre e.g. octroi d’avantages fiscaux,
accompagnement dans des stages de qualification, assouplissement de certaines charges
sociales, etc.
✓ appuyer la création d’entreprises, y compris de micro-entreprises par l’octroi de crédit
garanti, le financement de la formation qualifiante et leur assurer la participation au
marchés publics de l’Etat et des collectivités territoriales ;
✓ poursuivre la politique de transfert des ressources aux collectivités territoriales afin de
leur permettre de faire face aux impératifs de développement socioéconomique pour
participer à la lutte contre la pauvreté et les inégalités qui sont des problèmes plus infra
nationaux que nationaux ;
✓ réduire la taxe sur la consommation des ménages et à compenser par une augmentation
de l’impôt sur le revenu qui doit être progressif ;
✓ élargir la couverture sociale au secteur informel, accompagné d’une baisse des taux de
charges proportionnels au volume d’activités du secteur ;
✓ différencier la politique de lutte contre la pauvreté selon le milieu, en mettant l’accent sur
l’incidence en milieu urbain et la profondeur en milieu rural par un accroissement des
transferts monétaires vers les ruraux et l’instauration d’un revenu minimum pour les
ruraux ;
✓ renforcer les politiques de subventions des intrants et du matériel agricoles pour
augmenter la productivité agricole et par conséquent le revenu en milieu rural.
A moyen et long termes, un certain nombre de politiques peuvent être explorées et mises en
œuvre afin de réduire significativement la pauvreté et les inégalités et d’accroitre le bien-être
des ménages, entre autres :
(i). la politique de revenu minimum universel, financé sur les recettes publiques tirées de
l’exploitation minière industrielle, dans un premier temps en faveur des plus démunis
avant son élargissement à tous ceux dépourvus de sources de revenu autres que les
transferts ;
(ii). la politique de santé pour tous à travers un régime d’assurance maladie universelle, ce qui
réduirait la pauvreté et favoriserait le développement car une population en bonne santé
a une productivité plus grande ;
(iii). la politique de large accès aux services sociaux, notamment l’eau qui doit être considérée
comme une denrée de première nécessité à offrir à toute la population ;
(iv). la politique d’allocation chômage, dans un premier temps en faveur des jeunes diplômés
par exemple sous forme d’allocation forfaitaire d’un montant au moins égal au seuil
national de pauvreté jusqu’à obtention d’un emploi mais sur trois ans maximum ;
(v). la politique d’éducation obligatoire et gratuite des douze premières années de scolarité
jusqu’à obtention du diplôme secondaire sans qu’aucun enfant ne puisse être laissé pour
compte ;
(vi). la politique de bonne gouvernance en mettant l’accent sur une meilleure allocation
budgétaire des ressources publiques, la diminution du train de vie de l’Etat, la
transparence et la redevabilité dans la gestion des deniers publics et un fonctionnement
correct du système judiciaire ;
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42
Odhd
(vii). la négociation et l’application de contrats de partenariats public-privé (PPP) dans la
réalisation d’infrastructures sociales, énergétiques et de transports en faveur du secteur
privé national e.g. construction de cités universitaires, de centrales solaires, de routes, de
voies ferrées, etc.
Dans la perspective d’études futures, on pourrait intégrer dans l’évaluation de la redistribution
les subventions d’intrants et matériels agricoles censées accroitre le revenu des exploitations
agricoles, y compris les petites exploitations agricoles familiales. De la même manière, cette
évaluation pourrait intégrer les effets des exonérations de certains produits de première
nécessité sur quelques périodes de l’année telles que celles sur le pain, le riz, l’huile alimentaire,
la farine et le sucre en période de ramadan ou consécutivement à une flambée des prix importée.
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43
Odhd
Références bibliographiques
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45
Odhd
Annexes
Annexe 1. Indicateurs d’inégalités
Les mesures statistiques de dispersion comprennent :
• le coefficient ou l'indice de Gini, défini par ( )( )
=
+−−=
q
i
i
Yq
Y
iqG
1
2
121
où les individus i sont rangés par ordre croissant du revenu Yi dont Y est la moyenne avec q
groupes d'individus.
Le coefficient de Gini qui est un nombre variant de 0 à 1, où 0 signifie l'égalité parfaite et 1
signifie l'inégalité totale, est très utilisé pour mesurer l'inégalité des revenus dans un pays et sert
de mesure de l'inégalité économique, ce en quoi il est équivalent à l'écart moyen relatif (l'écart
moyen divisé par la moyenne pour le mettre à l'échelle). Associé à la courbe de Lorenz L(α),
qui représente la part cumulée des revenus en fonction de la part cumulée de la population, il
se calcule par rapport à la fonction qui associe à chaque part de la population touchant un revenu
classé par ordre croissant, la part que représentent ses revenus.
Dans la pratique, le coefficient de Gini estime l'inégalité par l'écart à la courbe de Lorenz de la
répartition égalitaire (en pointillés), soit le rapport de la surface (A) qui sépare la courbe de
Lorenz de la situation étudiée (en gras) et du triangle de surface (A)+(B):
( ) ( ) ( ) BBBBABBAAA
BA
A
G 212
2
122222
2
1
−=−=−+=−+===
+
=
Ainsi, le coefficient de Gini est égal à la différence entre 1 et le double de l'intégrale de la
fonction représentée par la courbe de Lorenz. En pratique, on ne dispose pas de cette fonction,
mais du revenu par "tranches" de population e.g. par déciles2 ou centiles. Aussi, pour ces
tranches, le coefficient est-il défini par la formule de Brown :
( )( )
−
=
++ +−−=
1
0
111
n
k
kkkk YYXXG
où X est la part cumulée de la population, et Y la part cumulée du revenu.
2 Alvaredo, F., Chancel, L., Piketty, T., Saez, E., Zucman, G. (2018) définissent la classe moyenne comme étant
"les 40% qui se situent entre les 50% du bas et les 10% du haut".
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46
Odhd
En particulier, pour n personnes ayant des revenus yi, pour i allant de 1 à n, indicés par ordre
croissant (Yi ≤ Yi+1):
n
n
Y
iY
G
n
i
i
n
i
i
1
1
1 +−=
=
=
• la variance 2Y
• le coefficient de variation
Y
Y
• les rapports de quantiles ou ratios de dispersion des quantiles e.g. P90/P10 ou P80/P20.
Il faut rappeler que les quantiles q sont les revenus qui divisent la population en q sous-
groupes de taille égale dans un classement par ordre croissant du revenu. Les parts du
revenu total détenues par chaque groupe, les revenus minimal, maximal ou moyens de
chaque groupe ainsi que les rapports inter-quantiles donnent des indications sur l’inégalité
dans la distribution du revenu
Les indices d'entropie généralisée (Flückiger et al, 2005) prennent la forme générale:
−
−
=
=
1
1
)1(
1
)(
1
n
i
i
Y
Y
n
GE
où n la population
Yi le revenu de l'individu ou du ménage i
Y le revenu moyen
le paramètre d'aversion à l'inégalité
Ils font apparaître un paramètre d'aversion à l'inégalité représentant "le poids donné aux
distances des valeurs de la variable d’intérêt à différents points de sa distribution"
(Abdelkhalek, T., Ejjanoui, F., 2012) telles que:
• "pour les valeurs les plus faibles de ce paramètre, la mesure GE est plus sensible dans la
région inférieure de la distribution
• "pour des valeurs plus élevées, la mesure GE est plus sensible aux changements qui
affectent la région supérieure".
Il faut noter que lorsque le revenu est distribué de façon égalitaire ( )YYi = alors ( ) 0=GE . Pour
différentes valeurs de ce paramètre , on a différents indices d'inégalité:
• =0, soit GE(0) ou indice L de Theil
==
=
−=
n
i i
n
i
i
Y
Y
nY
Y
n
GE
11
ln
1
ln
1
)0( l'Indice L de Theil, Indice qui permet de mesurer la contribution
d'un facteur donné à l'inégalité totale et ainsi "d'exprimer
l'inégalité au sein d'un groupe socioéconomique ainsi que
l'inégalité entre les différents groupes sociaux" (Royaume du
Maroc, 2002)
• =1, soit GE(1) ou indice T de Theil ou entropie de Shannon
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47
Odhd
=
=
n
i
ii
Y
Y
Y
Y
n
GE
1
ln
1
)1( l'entropie de Shannon ou indice T de Theil
• =2, soit GE(2) ou indice d'Atkinson, soit la moitié du carré du coefficient de variation.
( ) 2
2
1
2
2
1
2
1
1
1
2
1
2 K
YY
Y
n
GE Y
n
i
i =
=
−
=
=
l'indice d'Atkinson, où K est le coefficient de
variation
Les indices Atkinson-Kolm-Sen (AKS) ont la forme générale (Flückiger et al, 2005):
1
1
1
1)(
−=
=
n
i
i
Y
Y
n
A avec 1 et 0
Pour 0= , ( )
−=
=
n
i
i
Y
Y
n
A
1
ln
1
exp10 Indice de Mac-Rae, interprété comme une demande de revenu
A l'instar des indicateurs de pauvreté, les mesures de l'inégalité doivent satisfaire un certain
nombre de propriétés ou axiomes (Flückiger, Y., Naga, R.N., 2005):
✓ l'homogénéité de degré zéro pour les observations i.e. l'inégalité doit être indépendante
de la moyenne de la variable sur les observations
✓ l'indépendance de la taille de la population ou invariance à l'échelle
✓ la symétrie, l'inégalité doit restée inchangée si deux individus s'échangent leur revenu
✓ la sensibilité au transfert (principe des transferts de Pigou et Dalton), l'inégalité doit
baisser si un transfert a lieu d'un riche vers un pauvre ou d'un donateur mieux nanti vers
un bénéficiaire moins nanti, et inversement
✓ la décomposabilité par sous-groupes de la population.
La propriété de décomposabilité de la mesure de l'inégalité suppose que si l'on distingue S sous-
groupes de la population avec
=
=
s
j
j nn
1
alors, l'indice d'inégalité se décompose en deux parties
(une intragroupe et une intergroupe) tel que
ergroupecomposante
ragroupecomposante
S
j
jj BIWI
int
int
1
+=
=
La composante B est un indice d'inégalité calculé sous l'hypothèse que chaque individu du
groupe j ( )Sj ,1= a un revenu égal au revenu moyen de son groupe
=
=
j
k
k
j
j Y
n
1
1
tandis que
le coefficient de pondération de la composante intragroupe est donnée par:
=
jj
j
n
n
W
Les indices de Theil satisfont cette propriété, aussi ont-ils l'avantage "de permettre une
décomposition des inégalités continentales entre la part qui revient aux différences de niveau
de vie moyen entre pays et celle qui revient aux inégalités internes aux pays" (Cogneau, D.,
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48
Odhd
2007). Plus généralement (Royaume du Maroc, 2002), si la population est classée en k
catégories d'effectifs Nk, alors Theil (T) est décomposé comme suit:
( ) 21loglog
1
)( TT
Y
Y
YN
YN
TTheil
YN
YN
Y
Y
Y
Y
N
TTheil k
k
kk
k
k
kkii +=
+
=
=
où
=
=
k
i k
i
k
i
k
k
Y
Y
Y
Y
N
TTheil
1
log
1
)(
T1 ou inégalité interne, est la moyenne pondérée de l'inégalité déterminée au sein de chaque groupe
T2 ou inégalité entre groupes, est l'inégalité qui prévaudrait si chaque ménage jouissait du niveau de vie
moyen de son groupe respectif
T1/T est la part de l'inégalité au sein de divers groupes dans l'inégalité totale
T2/T est la part de l'inégalité entre ces différents groupes dans l'inégalité totale
Les groupes de décomposition possibles sont la région administrative du pays, le milieu de
résidence (urbain/rural ou capitale/autre urbain/rural), la taille du ménage, la catégorie
socioprofessionnelle, l'éducation, l'âge ou la génération.
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49
Odhd
Annexe 2. Indicateurs de pauvreté
L'indicateur général FGT de la pauvreté monétaire est définie par:
( )
=
−
=
q
i
i
Z
YZ
N
ZYP
1
1
:
où est le coefficient d'aversion à la pauvreté et
Z le seuil de pauvreté
Pour:
0= (Incidence de la pauvreté ou taux de pauvreté)
H
N
q
P ==0 où q le nombre total de pauvres
N la population totale (pauvres et non pauvres)
C'est la mesure la plus utilisée mais la pire des mesures au regard des axiomes:
✓ il ne rend pas compte de l'aggravation de la pauvreté des pauvres
✓ il ne rend pas compte du transfert de tout le revenu des pauvres aux non pauvres
1= (Profondeur de la pauvreté ou écart de pauvreté)
IH
Z
H
qZ
Y
N
q
Z
Y
NZ
YZ
N
P P
q
i
iq
i
i
q
i
i =
−=
−=
−=
−
=
=
==
111
11 1
11
1
Cet indicateur satisfait l'axiome de monotonicité mais ne satisfait pas l'axiome de
transfert. Il traduit les ressources qui seraient nécessaires pour extraire tous les pauvres
de leur situation par des transferts de liquidités parfaitement ciblés. Il permet en outre
de calculer l'écart relatif moyen des pauvres au seuil de pauvreté (I) ainsi que le montant
nécessaire pour éliminer la pauvreté (M) et l'indice Sen (S) :
ZZq
Y
ZZ
Y
qZ
Y
qZ
YZ
q
I PP
q
i
iq
i
i
q
i
i
q
i
i −=−=−=
−=
−=
−
=
=
===
1
1
1
1
1
1
11
11 1
111
IZqM =
( )
( ) ( ) GPPHiq
Z
YZ
Nq
S i 11 11
1
2
−+=−+
−
+
=
où Z le seuil de pauvreté
p le revenu moyen des pauvres
G l'indice de Gini
L'indice Sen postule que les écarts entre les individus ne doivent pas être vus de
la même façon, d'où la pondération par un coefficient iq −+1
2= (Sévérité de la pauvreté)
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Odhd
( )( )
+
=−+=
−=
−=
−
=
=
=
22
0
1
0
222
2
1
2
1
2
2
1
11
11
ZP
P
PVIIH
qZ
Y
N
q
Z
Y
NZ
YZ
N
P
P
P
q
i
iq
i
ii
où pV est le coefficient de variation du revenu des pauvres
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51
Odhd
Annexe 3. Indicateurs de redistributions
L’indice MT de Musgrave et Thin (1948) est égal au rapport entre l’égalité de Gini du revenu
net (l’écart à 1 de l’indice de Gini du revenu net) et l’égalité de Gini du revenu brut (l’écart à 1
de l’indice de Gini du revenu brut):
B
N
G
G
MT
−
−
=
1
1
Si le système d’impôts/transferts est progressif, l’indice de Musgrave et Thin aura une valeur
supérieure à 1.
L’indice K de progressivité de Kakwani (1977) est égal à la différence entre l’indice de
concentration des impôts/transferts et l’indice de Gini du revenu brut:
✓ pour un impôt T, l’indice Kakwani est donné par : BI GCK −=
✓ pour un transfert B, l’indice Kakwani est donné par : TB CGK −=
Graphiquement, l’indice de Kakwani est égal à deux fois l'aire entre la courbe de Lorenz et la
courbe de concentration des impôts/transferts. Basé sur TR de la progressivité (redistribution
des taxes), il prend ses valeurs dans l’intervalle 1,1 +− . Les valeurs négatives correspondent à
des systèmes régressifs et des valeurs positives à des systèmes progressifs.
L'indice RS de Reynolds-Smolensky (1977) est égal à la différence entre l’indice de Gini du
revenu brut et l’indice de concentration du revenu net (CN) tel que:
✓ pour un impôt, l’indice Reynolds-Smolensky est donné par : NB CGRS −=
✓ pour un transfert, l’indice Reynolds-Smolensky est donné par : BN GCRS −=
Basé sur l'approche IR (Income redistribution) de la progressivité, c’est-à-dire la redistribution
du revenu, cet indice est donné graphiquement par le double de la surface entre la courbe de
concentration des revenus nets et la courbe de Lorenz des revenus bruts. L'indice RS de
Reynolds-Smolensky varie entre -1 indiquant la régressivité parfaite et +1 indiquant la
progressivité parfaite. Ses valeurs positives correspondent à des systèmes régressifs et ses
valeurs négatives à des systèmes progressifs, la valeur nulle indiquant un système
d’impôts/transferts neutre.
Il peut s’écrire en fonction de l’indice de Kakwani: ( ) K
g
g
GC
g
g
RS BI
−
=−
−
=
11
où g désigne le ratio impôts sur revenu brut et K l’indice de Kakwani.
On note que le rapport de l’indice RS de Reynolds-Smolensky sur l’indice K de Kakwani est
égal au rapport entre l’impôt moyen et le revenu net moyen;
N
I
g
g
K
RS
=
−
=
1
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52
Odhd
Annexe 4. Termes de Référence
1. Contexte et justification
La lutte contre la pauvreté et la réduction des inégalités font partie des priorités essentielles du
Gouvernement du Mali. Depuis 2002, les différents Documents Stratégiques de Réduction de
la Pauvreté (DSRP) (CSLP I ; CSCRP I ; CSCRP II ; CREDD I ; CREDD II) leur accordent
une place importante. Ainsi, l’axe stratégique 3 du CREDD II (2019-2023) intégrant les ODD,
à savoir intitulé ?"Croissance inclusive et transformation structurelle de l’économie", consacre
un objectif spécifique à la promotion d’une croissance réductrice de la pauvreté et des
inégalités.
Selon Dao et Godbout (2014), pour lutter contre les inégalités, les États utilisent deux
instruments : les dépenses publiques, c’est-à-dire, la fourniture des services publics et des
transferts en espèce et, la fiscalité. Dans ce dernier cas, il s’agit du niveau de recettes fiscales
collectées et de la manière dont elles sont prélevées et dépensées. Dans le premier cas et pour
concrétiser sa volonté politique, l’Etat, parfois soutenu par des Partenaires Techniques et
Financiers, mène des actions pour non seulement rapprocher les populations des services
sociaux et économiques à travers la construction d’ infrastructures mais aussi pour faciliter
l’accès de ces mêmes populations aux services et biens publics.
Au regard de l’accessibilité géographique des populations aux infrastructures, des avancées
significatives ont été enregistrées dans le cadre de l’amélioration de l’accessibilité financière
aux services sociaux de base surtout durant les années antérieures à la crise multidimensionnelle
qui a débuté en 20123. Par exemple en 2018, le taux brut de scolarisation au niveau de
l’enseignement fondamental I était de 76,5% (Revue CREDD, 2019), le taux moyen
d’accessibilité à un rayon de 5 km d’un centre de santé était de 57% (CPS/SS-DS-PF, SLIS,
2018) et 82,9% des ménages maliens avaient accès à l’eau potable (EMOP, 2017).
S'agissant des prestations sociales, elles sont mises en œuvre à travers des régimes contributifs
et non contributifs. Pour les premiers, des soins médicaux, des allocations familiales, des
prestations de vieillesse, d'invalidité, du survivant, etc. sont accordés aux affiliés et/ou à leurs
ayants droits par les institutions de sécurité sociale. Quant aux seconds, essentiellement sous
forme d’aides sociales, ils constituent les différentes subventions du carburant, de l’électricité,
de l’eau, des intrants agricoles, des denrées alimentaires, des aliments bétails, les gratuités
scolaires et médicales, les distributions des kits scolaires, de l’appui nutritionnel aux enfants,
les transferts monétaires, etc. (Politique Nationale de Protection Sociale, 2016).
Par rapport à la fiscalité, l’engagement de la Direction générale des impôts s’est démontré à
travers un plan stratégique pour la période 2019-2021. Sixième du genre de l’Administration
fiscale, depuis sa création par l’Ordonnance N° 02-058/P-RM du 5 Juin 2002, ce plan consiste
à mener des activités qui contribueront à la pérennisation de l’accroissement des recettes pour
le développement économique et social du Mali.
Malgré les efforts fournis par le Gouvernement, l’état de la pauvreté et des inégalités au Mali
demeure insatisfaisant. C’est bien ce qui ressort de l’étude "Analyse-diagnostic des inégalités
entravant la croissance inclusive au Mali" réalisée par l’ODHD/LCP et le Centre Universitaire
de Recherche et d'Etudes Sociales(CURES) en 2019, après une analyse diachronique de la
3 Cf. Revues CREDD et CSCRP.
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53
Odhd
situation générale : "Au Mali, malgré la forte croissance économique enregistrée au cours de
ces 15 dernières années (5,7% en moyenne), force est de constater que les résultats en matière
de réduction de la pauvreté et des inégalités sur la période 2001-2017 restent faibles. En effet,
pendant la même période, le taux de pauvreté est passé de 55,6% à 44,9%, et les inégalités de
revenus mesurées par l’Indice de Gini, n’ont baissé que de 0,03 points en passant de 0,39 à
0,36 (MEF, Revue CREDD 2018). En outre, 64% de la population totale du pays sont touchées
par la pauvreté de masse et 22% vivent dans l’extrême pauvreté".
Il ressort de ces mêmes analyses quatre (4) formes majeures d’inégalité qui amoindrissent les
fruits d’une croissance inclusive pour tous, à savoir (i) les inégalités sur le marché du travail,
(ii) les inégalités de revenus, d’accès aux ressources productives et de redistribution, (iii) les
inégalités sociales et de développement humain et (iv) les inégalités de genre.
Au-delà de la persistance de la pauvreté monétaire, 43,8% d'incidence en 2018 (EMOP, 2019),
d'importantes inégalités de revenus existent. Ainsi, selon le Groupe de recherche en économie
appliquée et théorique (GREAT), en 2016, les 10% les plus riches gagnent 26 fois plus que les
10% les plus pauvres ou 10 fois plus que les 40% les plus pauvres. La forte inégalité constatée
est plus à l'intérieur des stratifications sociales ou spatiales qu'entre celles-ci. Ainsi, l'inégalité
entre classes de revenu est à 85% à l'intérieur des classes et à seulement 15% entre classes. Il y
aurait ainsi plus d'inégalité entre individus qu'entre groupes plus ou moins homogènes
d'individus (GREAT Savoir n°063, mars 2016).
Du point de vue de la répartition géographique, quelle que soit la mesure de la pauvreté, elle
est davantage rurale. En 2018 sur le plan monétaire, en milieu rural, plus de la moitié de la
population était pauvre (54,1%) contre une incidence de 24,6% pour le milieu urbain hors
Bamako et 4,1% pour le District de Bamako (EMOP, 2019).
Il en est de même pour la pauvreté des conditions de vie. En effet, le Profil de la pauvreté au
regard de l’offre des services sociaux et économiques de base (éducation, santé, eau, énergie,
banque, couverture téléphonique, etc.) élaboré par l’ODHD/LCP, en 2018, révèle que sur 666
communes rurales, seulement 143 sont "non pauvres", soit 21% contre 86% pour les 37
communes urbaines.
Par ailleurs, dans le domaine de la fiscalité, le taux de pression fiscale, compte tenu ou non des
incitations fiscales, constitue un levier et un mécanisme permettant d'une part d'orienter
l'affectation des ressources d'une économie et d'autre part, de modifier la redistribution des
revenus et des patrimoines. Ainsi au Mali, la pression fiscale était de 11,9 % du PIB en 2018,
largement en deçà des normes communautaires de l’UEMOA (20% à l’horizon 2019). Les défis
liés aux recettes fiscales sont principalement induits par la situation économique fragile du pays
imputable surtout à l’insécurité qui y règne, plus particulièrement au Centre et au Nord du pays.
Au-delà de la situation économique, il y a une faible communication sur les impôts au Mali sur
le secteur informel où bon nombre de contribuables ne savent pas combien et comment payer
et souvent ne veulent pas payer.
Vu ces réalités nationales, et pour être en cohérence avec les engagements internationaux (ODD
des Nations-unies, Agenda 2063 de l'Union africaine) dans la perspective de réduction de la
pauvreté et des inégalités pour plus d’équité et de justice sociale, la réalisation d’une étude
faisant le point des mécanismes de distribution et de redistribution de revenus et leurs impacts
sur la pauvreté se justifie pleinement.
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Odhd
2. Objectifs
1.1 Objectif général
L’objectif général de l’étude est d’analyser les impacts de la distribution et de la redistribution
du revenu sur la pauvreté et les inégalités au Mali.
1.2 Objectifs spécifiques
Les objectifs spécifiques visés par l’étude sont :
- décrire les différentes formes de pauvreté, d’inégalités sociales dûes ou liées à la
distribution et à la redistribution des revenus ;
- analyser de la structure fiscale, surtout en lien avec la distribution et la redistribution
des revenus ;
- analyser les mécanismes des transferts publics en lien avec la réduction de la pauvreté et
des inégalités ;
- évaluer l’impact des mécanismes de distribution et de redistribution sur le niveau de vie
des populations ;
- proposer des mesures en vue d’un meilleur ciblage des transferts publics et d’améliorer
la distribution et la redistribution des revenus.
- identifier des stratégies pouvant favoriser la mise en œuvre des mesures proposées.
3. Résultats attendus
Les résultats attendus de l’étude sont :
- les différentes formes d’inégalités sociales dûes ou liées à la distribution et à la
redistribution des revenus sont décrites ;
- la structure fiscale en lien avec la distribution et la redistribution des revenus est
analysée ;
- les mécanismes des transferts publics en lien avec la réduction de la pauvreté sont
analysés ;
- l’impact des mécanismes de distribution et de redistribution sur le niveau de vie des
populations est évalué ;
- des recommandations en vue d’un meilleur ciblage des transferts publics et d’améliorer
la distribution et la redistribution des revenus sont proposées.
-
4. Profil des consultants et/ou du bureau d’études
Pour la réalisation de cette étude, les compétences d’un bureau d’études ou de quatre (4)
consultants individuels seront sollicitées, à savoir un économiste de développement, un
fiscaliste, un spécialiste de la sociologie ou anthropologie du développement et un statisticien.
L’économiste de développement doit avoir :
- au moins bac+4 en sciences économiques/sociales et des compétences avérées dans le
domaine de l'analyse de la pauvreté et des inégalités de revenus;
- une bonne maîtrise des politiques nationales et sectorielles de lutte contre la pauvreté et
de développement social du Mali ;
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55
Odhd
- une expérience notoire d’au moins cinq (5) ans de recherche dans le domaine de la
réduction de la pauvreté et des inégalités ;
- une bonne maîtrise des questions de développement durable
- une expérience de travailler en équipe.
Le fiscaliste doit avoir :
- au moins bac+4 en sciences économiques/juridiques et des compétences avérées dans
le domaine de la comptabilité nationale ;
- au moins cinq (5) ans d’expérience dans la recherche sur les questions de fiscalités ;
- une bonne maîtrise des questions de développement durable ;
- une bonne connaissance de l’évolution des questions de développement institutionnel
du Mali et des politiques et stratégies de fiscalité au Mali ;
- la capacité de travailler en équipe.
Le spécialiste en sociologie ou anthropologie du développement doit avoir :
- au moins bac+4 en sciences sociales ;
- une expérience notoire d’au moins cinq (5) ans de recherche dans le domaine de
l'analyse de la pauvreté et des inégalités de revenus ;
- une bonne maîtrise des questions de développement durable et spécialiste des questions
de pauvreté, d'inégalités de revenus, de distribution et de redistribution de revenus ;
- une bonne connaissance de l’évolution des questions de développement institutionnel
du Mali et des politiques et stratégies de développement social et de protection sociale;
- la capacité de travailler en équipe.
Le statisticien doit avoir :
- au moins bac+ 4 en statistique ou économétrie ;
- une bonne maîtrise des politiques nationales et sectorielles de lutte contre la pauvreté et
de développement social du Mali ;
- au moins cinq (5) ans d’expérience dans la collecte, le traitement et l’analyse des
données socioéconomiques en général et dans le domaine de la pauvreté et des inégalités
en particulier ;
- une expérience de travailler en équipe.
5. Méthodologie
Pour mener à bien cette étude, une première étape sera consacrée à la revue documentaire.
Aussi, des entretiens de terrain seront-ils menés en vue de recueillir des données secondaires
voire des bases de micro-données auprès des structures pertinentes comme l'INSTAT (Institut
national de la statistique), la DGI (Direction Générale des Impôts), la DGB (Direction Générale
du Budget), etc. entretiens auprès de qui ?
Le bureau d'études ou l’équipe de consultants recrutés pour cette étude proposeront une
démarche méthodologique détaillée dans une note de compréhension des présents TDR et un
plan de rédaction.
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56
Odhd
6. Durée de l’étude
Cette étude s’étend sur une période de quatre (4) mois dont trois (3) pour le contrat.
Le tableau ci-dessous donne les détails du chronogramme des travaux :
Activités Mois1 Mois 2 Mois 3 Mois 4
Semaines Semaines Semaines Semaines
Validation des TDR
Choix des consultants
Elaboration et validation de la note de
compréhension des TDR
Elaboration des outils
Collecte, traitement et analyse des données
Dépôt du rapport provisoire
Examen technique
Validation, intégration des observations et dépôt
du rapport final
7. Financement
La présente étude sera financée sur le budget national et les fonds PNUD.
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